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🖋 Autoportrait de travailleur social ‱ Kevin Louineau, Ă©ducateur spĂ©cialisĂ© en maison d’enfants Ă  caractĂšre social en Loire-Atlantique.

«  Au lycĂ©e, j’ai pris quelques renseignements et le mĂ©tier d’éducateur est apparu. J’ai posĂ© un mot sur une façon d’intervenir, une fonction, une vocation mĂȘme  »



Sur cette photo je suis en camp à la montagne avec les jeunes accompagnées. Un vrai moment de partage et de plaisir.

Quel mot associez-vous spontanĂ©ment au travail social ?

Disponibilité.


Pour quelles raisons avez-vous choisi votre mĂ©tier ?

Ça remonte au LycĂ©e. J’étais toujours Ă  l’écoute de ceux qui avaient besoin de se confier et qui rencontraient des difficultĂ©s diverses et variĂ©es. C’était assez naturel pour moi, cela ne constituait pas une contrainte, plutĂŽt une habitude. Je donnais de mon temps car j’aurais bien aimĂ©, plus jeune, que des personnes donnent du leur pour m’écouter. Si des choses m’avaient manquĂ©, il ne fallait pas qu’il en aille de mĂȘme pour d’autres.
J’ai pris quelques renseignements et le mĂ©tier d’éducateur est apparu ; j’ai posĂ© un mot sur une façon d’intervenir, une fonction, une vocation mĂȘme. J’étais trĂšs attirĂ© par le travail effectuĂ© au sein des quartiers sensibles, la prise de contact, le fait de se faire accepter, de comprendre les codes. Je me voyais exercer le mĂ©tier d’éducateur en prĂ©vention.
Plus tard, il y a eu mes premiĂšres expĂ©riences dans l’animation et ma rencontre avec des enfants aux parcours de vie compliquĂ©s vers lesquels je me tournais plus facilement. Tous ces Ă©changes sont venus conforter mon choix.


Quelles formations avez-vous suivies ?

De 2002 Ă  2005, j’ai suivi une formation de moniteur-Ă©ducateur Ă  l’Institut rĂ©gional du travail social (IRTS) de Poitiers (Vienne). En 2012, j’ai obtenu le diplĂŽme d’éducateur spĂ©cialisĂ© grĂące Ă  la VAE. J’avais en effet les mĂȘmes fonctions que mes collĂšgues Ă©ducateurs spĂ©cialisĂ©s et je souhaitais ĂȘtre reconnu Ă  cette place. En septembre 2021, je suis entrĂ© en Master Intervention et dĂ©veloppement social (IDS) car, dans une perspective d’évolution, j’aspire Ă  prendre des fonctions d’encadrement.


Quel est votre meilleur souvenir professionnel ?

Il y en a beaucoup, fort heureusement. Si je ne devais en mettre qu’un en avant, je parlerais de cette jeune fille accueillie au sein d’un collectif en maison d’enfants Ă  caractĂšre social (Mecs) qui faisait « tout flamber » et nĂ©cessitait un accompagnement sur mesure. Lorsque la situation est devenue impossible Ă  gĂ©rer en collectif, nous l’avons suivie Ă  partir du domicile de sa tante. Nous avons amĂ©nagĂ© sa scolaritĂ©, l’avons calmĂ©e quand ça devenait trop explosif. Nous avons trouvĂ© sans cesse des leviers pour la faire avancer car elle avait un Ă©norme potentiel.
Ensemble, nous avons engagĂ© une rĂ©flexion autour d’un sĂ©jour de rupture au SĂ©nĂ©gal, l’idĂ©e Ă©tant de lui trouver un but tout en s’éloignant de l’agitation quotidienne qui l’envahissait. J’étais de toutes les Ă©tapes de ce projet, rĂ©pondant Ă  ses interrogations et la rassurant lorsque cela Ă©tait nĂ©cessaire. Ce fut un long chemin qui nous a conduit jusqu’à Orly le jour de son envol pour Dakar. C’était un grand moment d’émotion pour plusieurs raisons : d’une part, c’était la concrĂ©tisation d’un projet initiĂ© depuis plusieurs mois et d’autre part, je fus le dernier maillon de la chaĂźne qui l’accompagnait jusqu’à cet ailleurs, mais cet ailleurs, elle devait le vivre sans moi.
Le sĂ©jour de rupture fut un succĂšs et j’ai revu quelques annĂ©es plus tard cette jeune femme avec grand plaisir.


Le pire ?

Celui qui me vient en tĂȘte est assez rĂ©cent. Il s’agit d’une jeune femme accompagnĂ©e dont je n’étais pas le rĂ©fĂ©rent mais pour laquelle j’ai assumĂ© ce rĂŽle durant un Ă©tĂ©, en l’absence de mes collĂšgues. Elle avait accouchĂ© d’une petite fille mais n’était pas capable de s’en occuper seule. Notre service n’était pas adaptĂ© pour les accueillir toutes les deux : c’est pourquoi nous avions effectuĂ© les dĂ©marches pour lui trouver un lieu avec tout l’accompagnement utile (travailleurs sociaux et environnement adaptĂ©). Son comportement s’est dĂ©gradĂ© trĂšs vite dans la pĂ©riode post-accouchement alors qu’elle Ă©tait encore hospitalisĂ©e : toute l’attention s’était portĂ©e sur l’enfant et insuffisamment sur elle Ă  mon sens. La suite a Ă©tĂ© plutĂŽt dramatique mais je ne m’étendrai pas sur cela.


Quel est votre livre de chevet ?

Je lis beaucoup mais peu d’ouvrages consacrĂ©s au travail social car j’ai besoin de m’évader sur mon temps personnel. Pour autant, le livre de Lyes Louffok Dans l’enfer des foyers (Éd. Flammarion, 2014) m’a marquĂ©. Sa description dure de certains Ă©ducateurs qu’il a cĂŽtoyĂ©s est tellement l’opposĂ© de la reprĂ©sentation que je me fais de cette fonction qu’elle m’a causĂ© un choc. Cette mise en lumiĂšre des dĂ©rives de certains travailleurs sociaux est nĂ©cessaire et si elle peut servir Ă  assainir des Ă©tablissements, j’invite d’autres acteurs Ă  libĂ©rer leur parole.




Retrouvez les précédents autoportraits

🖋 Murielle A., Ă©ducatrice spĂ©cialisĂ©e en centre d’hĂ©bergement et de rĂ©insertion sociale (CHRS)

🖋 Thierry Trontin, co-gĂ©rant de la SCOP Voyageurs-Éducateurs et d’un lieu de vie et d’accueil

🖋 Laurence, rĂ©fĂ©rente de parcours du Programme de rĂ©ussite Ă©ducative

🖋 Romain Dutter, ex-coordinateur culturel au centre pĂ©nitentiaire de Fresnes

🖋 Yazid Kherfi, mĂ©diateur tout terrain

🖋 Claude, assistante de service social en polyvalence de secteur

🖋 Patrick Norynberg, formateur consultant en politique publique, cofondateur et prĂ©sident de la RĂ©gie de quartier du Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis)

🖋 Émilie Philippe, Ă©ducatrice de jeunes enfants, membre du collectif Pas de bĂ©bĂ©s Ă  la consigne depuis sa crĂ©ation en 2009.

🖋 Florent GuĂ©guen, directeur de la FĂ©dĂ©ration des acteurs de la solidaritĂ© (FAS)

🖋 LĂ©a Turchi, assistante de service social, coordinatrice Ă  la mission interface au Samusocial de Paris

🖋 Sadek Deghima, chef de service d’un club de prĂ©vention spĂ©cialisĂ©e

🖋 Lucile Bourgain, monitrice-Ă©ducatrice

🖋 Tristan Montaclair-Le Foulgoc, Ă©ducateur de jeunes enfants qui travaille avec des adolescents

🖋 Cristel Choffel, conseillĂšre technique de service social

🖋 Driss Blal, Ă©ducateur spĂ©cialisĂ©, chef de projet au cƓur d’un dispositif mis en place par un collectif d’habitants originaires du quartier populaire oĂč il a grandi Tarbes (Hautes-PyrĂ©nĂ©es)

🖋 Laure, assistante de service social en service spĂ©cialisĂ© « Familles »

🖋 Vince, l’éduc spĂ©cial, agitateur spĂ©cialisĂ©, dessinateur, chroniqueur, auteur, et accessoirement chef de service Ă©ducatif...

🖋 Julie (1), 33 ans, cheffe de service dans une structure accompagnant des mineurs isolĂ©s Ă©trangers

🖋 Carlos Lopez, Ă©ducateur Ă  la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) depuis 1999

🖋 Charline Olivier, intervenante sociale en gendarmerie

🖋 Antonio ArgĂŒelles BalletbĂł, Ă©ducateur dans un centre rĂ©sidentiel d’action Ă©ducative (1) des Filles de la CharitĂ©, Fondation sociale Ă  Barcelone (Espagne)

🖋 Sylvie Kowalczuk assistante de service social en polyvalence, formatrice occasionnelle, auteur

🖋 FrĂ©dĂ©ric Maignan, formateur indĂ©pendant en travail social

🖋 Émilie Mocellin, Ă©ducatrice spĂ©cialisĂ©e indĂ©pendante

🖋 Vivien Laplane, Ă©ducateur spĂ©cialisĂ©, auteur, confĂ©rencier, bloggeur, et accessoirement sourd appareillĂ© oralisant

🖋 Sophie Gaillard, secrĂ©taire mĂ©dico-sociale dans deux services d’éducation et de soins spĂ©cialisĂ©s Ă  domicile (Sessad) en rĂ©gion PACA

🖋 Jean-Marie Vauchez, Ă©ducateur spĂ©cialisĂ© et formateur, membre du Haut conseil du travail social (HCTS)

🖋 Ingrid Romane, Ă©ducatrice en maison d’enfants Ă  caractĂšre social dans le var

🖋 Xavier Bouchereau, chef de service en protection de l’enfance et consultant indĂ©pendant

🖋 StĂ©phanie Liatard, travailleuse sociale au QuĂ©bec, Canada

🖋 JĂ©rĂŽme Beaury, directeur-adjoint auprĂšs de la Direction de l’enfance et de la famille du Calvados, en charge de l’Aide sociale Ă  l’enfance et auteur

🖋 Romane Glotain, Ă©ducatrice spĂ©cialisĂ©e et prĂ©sidente de l’association "Le Jardin des Maux’passants en Loire-Altantique. Elle promeut les jardins thĂ©rapeutiques.

🖋 Maximilien Bachelart, Docteur en psychologie et psychothĂ©rapeute, superviseur au sein d’établissements de protection de l’enfance.

🖋 Audrenne Henke, directrice d’établissement.


Vous ĂȘtes tentĂ©s par l’exercice d’autoportrait de travailleur social ? Vous souhaitez partager votre expĂ©rience ? N’hĂ©sitez Ă  nous contacter Ă  l’adresse suivante : katia.rouff@lien-social.com