Paroles de métiers

Combien de pratiques professionnelles instrumentalisées par des logiques budgétaires ou des obsessions technocratiques ? Mais combien d’autres encouragées et stimulées par une dynamique institutionnelle porteuse ? La subordination de la clinique au diktat hors-sol, pour fréquente qu’elle soit n’a rien d’incontournable.

On rapporte que la première question que vous pose un américain attrait à votre niveau de rémunération, aune à laquelle il vous jugera. Rien de tel en France encore imprégnée de cette maxime de la Bible affirmant qu’on ne peut servir en même temps Dieu et l’Argent.

Un mantra voudrait que la personne en difficulté serait la mieux placée pour trouver les solutions lui convenant. La légitime préoccupation à promouvoir le pouvoir d’agir ne provoque-t-elle pas là un effet particulièrement pervers : l’invalidation de toute légitimité à l’accompagnement ?

Une trop grande familiarité avec la personne accompagnée peut parfois être vécue comme une forme de rabaissement. Mais à l’inverse une trop grande distanciation peut tout autant être perçue comme une sorte de désintéressement. Entre infantilisation et désinvestissement trouver la bonne posture est toujours complexe.

S’engager dans l’action sociale s’abreuve souvent à des motivations enfouies (ou non). Les écueils rencontrés individuellement constituent-ils des atouts ou des freins à l’implication professionnelle ?

Notre détermination à accompagner au mieux les publics en difficulté semble privilégier l’assertivité, l’assurance et la maîtrise. Autant de qualités des plus utiles. Mais, la temporisation, la circonspection et la prudence ne le sont pas moins !

Comment peut-on imaginer que des professionnels agissant au quotidien dans l’accompagnement des plus fragiles puissent se fourvoyer dans des convictions discriminatoires ? Et si le cauchemar était déjà réalité ?

Les orientations adoptées, depuis quelques décennies, par l’action sociale placent nombre de travailleurs sociaux en porte-à-faux avec leur éthique. Quelle réaction adopter ? Faut-il privilégier l’ajustement à ces paradigmes ou s’y opposer ?

Que l’accompagnement se termine sous la forme d’une rupture brutale ou du fait l’aboutissement de la mesure, il arrive que cette échéance laisse un goût amer aux professionnels.

On connait la fameuse phrase attribuée tantôt à Gandhi, tantôt à Mandela et reprise par ATD Quart-monde : «  Tout ce que vous faites pour moi sans moi, vous le faites contre moi  ». Comment articuler l’action des professionnels et celle des personnes accompagnées ?

L’accompagnement psycho-social privilégie la parole comme principal outil relationnel. S’il est bien une gageure, c’est à la fois de ne pas bloquer l’expression d’autrui par son propre débit et à la fois de répondre à son éventuel besoin de contenance psychique et de sécurité, en lui tenant un discours rassurant et structurant.

Être porteur d’un vécu proche des difficultés du public qu’on accompagne : atout ou handicap ? Et si l’on dépassait ce vieux débat, en s’inspirant du croisement des savoirs préconisé par ATD-Quart monde : savoir académique, professionnel et expérientiel.