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Par Sadek DEGHIMA - Responsable de Service, Service de Prévention Spécialisée Avenir des Cités

La France a été secouée par des violences urbaines suite au décès du jeune Nahel tué par un policier le 27 juin dernier lors d’un contrôle routier à Nanterre. La vidéo de la mort du jeune tué par un tir policier à bout portant qui a circulé sur les réseaux sociaux a été l’un des éléments déclencheurs d’un soulèvement de la jeunesse face à la puissance publique, mais il n’est pas le seul. Derrière ce soulèvement de la jeunesse des quartiers populaires, il y a un sentiment d’identification très fort au drame accentué par l’émotion suscitée par la mort d’un « pair », mais il faut y voir également une forme de désespoir d’une jeunesse qui exprime son mécontentement face aux nombreuses injustices et inégalités vécues dans leur quotidien (emploi, logement, contrôles d’identité à répétition, absence de perspectives d’avenir, discrimination…) et le sentiment de ne pas être écouté ni compris. Tout au long de leur parcours de vie (scolaire, travail, quartier …), ces jeunes subissent la « stigmatisation » du reste de la population qui en a des représentations négatives, influencées par l’image véhiculée des médias et des réseaux sociaux.
Ces jeunes se voient attribuer des identités négatives qui entrainent des bouleversements dans leur identité qu’ils finissent par intégrer, cela leur fait perdre confiance en eux.
La violence semble être pour certains jeunes la seule façon de s’exprimer, d’être reconnu, de se faire entendre et une manière d’attirer la lumière et les caméras sur leurs quartiers et leur situation. Malheureusement, en France on s’intéresse aux « problèmes de fond », que dans les situations de crise et de tensions, alors que la prévention est sans doute une des clés du problème.
À l’origine des violences, il y a souvent des problèmes de communication, ainsi dans toute la France les équipes d’éducateurs de rue de Prévention spécialisée qui agissent dans le cadre d’une mission de protection de l’enfance se sont mobilisées jour et nuit pour renouer le dialogue avec cette jeunesse qu’ils connaissent bien.
Dans le Pas de Calais, les équipes du Service de prévention spécialisée « Avenir des Cités » qui interviennent sur 3 communes du bassin minier favorisent un travail de proximité à travers une présence continue durant toute l’année lors du « travail de rue » qui consiste à « aller vers » le jeune directement sur son lieu de vie.
Ce travail de fond permet d’identifier les problématiques, de ressentir la température du quartier en temps réel, mais également d’avoir une bonne connaissance des jeunes ce qui favorise la communication.
À la suite des événements en France, les éducateurs d’Avenir des Cités ont accentué leur présence sur les réseaux sociaux (promeneurs du net) et sur le terrain en sillonnant les rues afin de recueillir le ressenti des jeunes où l’on pouvait entendre dans leurs propos beaucoup de colères à l’égard de la société face au drame de Nahel. Certains jeunes avaient envie de tout casser en voulant se mettre en scène pour imiter ce qui se fait dans d’autres villes en s’inspirant des images qu’ils regardent en boucle sur les réseaux sociaux (Snapchat, TikTok…). Les nombreux échanges et débats avec les éducateurs et la psychologue de rue leur ont permis aux jeunes d’extérioriser leurs colères, mais également de leur permettre de réfléchir afin de trouver par eux même les modes d’actions les plus adaptées face à cette situation. Cette présence quotidienne sur les quartiers contribue à apaiser les tensions et parfois même à éviter les violences.
Il est important pour nous de proposer aux jeunes, des espaces de confrontations, de construction identitaire qui permettent de favoriser les échanges et les débats afin d’éviter l’exclusion sociale et de faciliter leur intégration au sein de la société.
La mise en place d’actions collectives de valorisation (sport, loisir, culture…) permet aux jeunes d’être reconnus et d’avoir confiance en eux par l’image qu’on peut leur renvoyer.