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► LE BILLET de Vince • Marie-France, Denis, Moussa et les autres…

Marie-France travaille à la MECS depuis plus de 30 ans. Au lever, elle accueille chaque jeune avec un sourire, un petit mot gentil, un geste affectueux. Elle en a reçu des confidences ! Des joies pudiques, des peines secrètes, des espoirs enfouis, des peurs indicibles, des colères contenues. Marie-France, c’est la figure de stabilité du groupe, le pilier du quotidien. Toujours là où il faut, quand il faut. Elle essuie les larmes aussi bien que les assiettes chaudes de l’égouttoir. Marie-France, c’est la maîtresse de maison du foyer. Elle connaît par cœur les niches à poussière et les troubles du cœur. Elle sait débusquer les moutons autant que les loups. Elle connaît plein de petites recettes réconfortantes : celle du moelleux au chocolat ou celle du câlin au retour de l’école. Elle accorde du temps. Elle ramasse les chaussettes et les idées noires qui trainent. Elle est douce, toujours positive, rassurante.
Denis bosse ici, depuis longtemps, lui aussi. Il a toujours un œil sur les enfants dehors. Il est discret, timide, taiseux, mais il connaît les habitudes de chaque gamin comme personne, à force de les observer. Denis, il bricole tout le temps, un peu comme les éducs. C’est l’homme d’entretien du foyer. Il répare les portes fracassées, il vérifie toujours le niveau d’huile du vieux minibus, il taille les rosiers, il rebouche les trous, change les ampoules grillées, contrôle l’état des extincteurs… L’équipe éducative lui met facilement dans les pattes le moindre gamin qui crise et qui perturbe le groupe. On lui confie souvent et volontiers le petit Kamel parce qu’il est ingérable sur le collectif. Et ça marche. Denis est toujours calme, patient, attentif. Bizarrement, avec lui Kamel s’apaise. Kamel adore bricoler. Kamel adore Denis. Ils se parlent peu, mais se comprennent parfaitement.
Moussa est arrivé à la MECS il y a huit mois seulement. C’est déjà la coqueluche de tous les minots. Moussa arrive toujours au crépuscule, avec son trousseau de clés à la ceinture, sa petite lampe et toujours plein de bonnes blagues. Moussa est veilleur de nuit. Les enfants l’attendent avec impatience, à chaque fois. Quand il est de service, les couchers se déroulent dans la bonne humeur. Moussa a le don de transformer les larmes en sourires. Il ne lit pas d’histoires parce qu’il ne sait pas lire mais il en raconte plein. Moussa a l’intelligence du cœur. Il repère toujours celui à qui il faudra accorder plus d’attention. Il laisse certaines portes entre-baillées, pour contenir des angoisses, il apporte des verres d’eau et des mots tendres, il change les draps en cas d’accident nocturne, il ne crie jamais et se soucie toujours des cauchemars.
Marie-France, Denis et Moussa ne sont pas travailleurs sociaux. Ils sont des travailleurs DU social. Ne les oublions pas. Battons-nous aussi pour la reconnaissance et la valorisation de leurs métiers essentiels. Ils représentent des figures d’attachement souvent bien plus stables que des éducs qui réunionnent en permanence ou qui grattent un cahier de liaison… parce que, comme papa ou maman, ils cuisinent des bons petits plats, bricolent au garage ou savent réconforter même en pleine nuit.