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■ ACTU - Fraude social, RSA : halte à la chasse aux pauvres

« Les associations de lutte contre la pauvreté s’alarment du mépris du gouvernement pour les personnes précaires, alors que ces dernières affrontent une inflation forte et une pauvreté grandissante. »

Hier, le collectif Alerte, 34 fédérations et associations, rappelle au gouvernement, dans un communiqué, ses engagements en matières de lutte contre les inégalités. « En octobre 2022, la Première ministre annonçait un pacte des solidarités pour janvier 2023, reporté en mars, puis en mai… et maintenant relégué dans les chantiers non prioritaires de la rentrée. »



Les ouvriers immigrés qui construisent la France devront y résider 9 mois au lieu de 6, pour pouvoir toucher le minimum vieillesse. ©PxHere

En revanche, la lutte contre les pauvres bat son plein à coup de petites phrases écorcheuses de dignités. Chaque mesure d’économie au dépend des plus faibles s’accompagne d’un propos stigmatisant.

L’obligation d’activité des bénéficiaires du RSA prévue par France Travail ? C’est pour répondre au sentiment d’injustice explique le Président en décembre lors de son interview sur TF1 et France2 : « Beaucoup de travailleurs disent : ‘‘Vous nous demandez des efforts [mais] il y a des gens qui ne travaillent jamais [et qui] auront le minimum vieillesse’’. »

Chantiers non prioritaires

La très controversée réforme des retraites, la crise du logement, l’envolé des coûts de l’énergie, l’augmentation du recours à l’aide alimentaire, la pénurie de professionnels du soin, la casse du service public… le vrai sujet d’énervement est ailleurs selon Roselyne Bachelot. Ainsi la coqueluche des médias et ancienne ministre lestée de casseroles analyse analyse sur l’antenne de RTL : « La voisine qui touche une allocation de mère isolée alors qu’elle ne l’est pas, la personne en situation irrégulière qui utilise la carte vitale d’un assuré social… C’est ce qui énerve les Français. »

Le ministre du budget l’a bien compris, il voit donc une urgence à renforcer la lutte contre la fraude sociale. Dans ce cadre, les retraités bénéficiaires de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) vont devoir résider en France neuf mois par an, au lieu de six, à partir du 1er septembre. En ligne de mire, les Chibanis originaires du Magreb ou d’Afrique Subsaharienne.

Fraude vs non recours

Ils ont construit les routes et les immeubles de France, mais n’ont pas suffisamment cotisé en raison de carrières hachées, de travail non déclarés, parfois même non rémunérés, et des patrons qui ne reversaient pas les cotisations. Déjà vulnérables, ils vont subir un contrôle renforcé qui engendre endettement, ruptures de soins, des expulsions locatives, errance… donc un surcroit de travail pour les travailleurs sociaux qui les accompagnent.

« Nous avons besoin de ces combats contre la fraude, il y va du pacte social, mais pourquoi désigné à la vindicte les plus faibles. Quand les membres du gouvernement disent ‘’il y a ceux qui vivent du travail et ceux qui vivent des aides’’, c’est de la stigmatisation », s’indigne le pourtant fort diplomate président de la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS), Pascal Brice, sur BFM. 

Le collectif Alerte souligne que la fraude sociale est insignifiante par rapports au non recours et préconise des mesures urgentes pour vaincre la pauvreté : aligner les minima sociaux sur l’inflation, supprimer les sanctions automatique facteur de précarisation, relance de la construction de logement abordable, autorisation de travail pour les étrangers quelques soit leur situation administrative. Plus facile d’enfoncer les pauvres.

Myriam Léon

À lire aussi dans Lien Social n° 1260 : Aide alimentaire • La part du pauvre et dans le n°1177 : Chibanis • Nous vieillirons ensemble !