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■ ACTU - Protection de l’enfance • Sauvegarde 93 en détresse

« Quand les éléphants se battent, c’est toujours l’herbe qui est écrasée ». Ce 23 mars, ce slogan résume l’état d’esprit des 70 salariés rassemblés devant le siège de la Sauvegarde 93. Avec 400 salariés, 5600 enfants et adolescents accompagnés et un budget de 26 millions d’euros, c’est l’une des principales associations en charge de la protection de l’enfance en Seine-Saint-Denis. Comme en décembre puis en janvier, les travailleurs sociaux sont là pour dénoncer des conditions de travail qui entravent leur mission.

Alertes

Depuis 2015, ils tentent d’alerter leur direction générale sur des pratiques managériales autoritaires qui provoquent mal-être et départs en cascade. En deux ans, trois chefs de service et trois directeurs se sont succédés. Au-delà de leur souffrance, les salariés de l’action éducative en milieu ouvert (AEMO) regrettent des décisions sans concertation qui vont à l’encontre du bien-être des enfants placés sous leur protection : réunion d’enfants mélangeant victimes et auteurs de violences sexuelles, retrait de famille d’accueil quand l’assistante familiale conteste des décisions de la direction, interdiction pour les éducateurs de réaliser les visites à domicile pour les mêmes raisons… Ces constats ont fait l’objet de courriers, actions auprès des prud’hommes, saisie de la médecine du travail.

Pressions

Au lieu de prendre en considération ces remontées de terrain, la direction promeut la directrice du placement familiale, à l’origine de ce management délétère dans son service, en la nommant directrice des services, de l’activité et du développement (DSAD), soit un poste de numéro deux dans l’association. Courant février, la directrice du service AEMO-AED-AEMO intensive démissionne et s’en explique dans une lettre adressée aux syndicats, à la direction et à l’inspection du travail. Elle y explique « une pression assimilable à une forme de harcèlement moral » avec, entre autre, la demande de sanctionner disciplinairement les salariés exprimant leurs inquiétudes face à cette nomination.

Souffrances

Le 15 mars, un comité social et économique (CSE) central extraordinaire s’est tenu pour aborder plus globalement les problèmes de management et de souffrance au travail. Déjà le 23 décembre, un droit d’alerte avait été émis par le syndicat Force ouvrière, cette fois pour trois autres salariés travaillant dans le service dédié à la prévention spécialisée et basé à Noisy-le-Grand. « Nous voulons une rupture avec ce qui se fait en matière de gouvernance, lance Farid Bennaï, délégué syndical FO. On ne veut pas voir un fusible sauter mais le système changer. Lorsqu’un cadre dérape, il doit être recadré. » En réponse la présidente de l’association annonce demander au conseil départemental une « inspection flash » dans les deux services concernés. Le département rappelle lui qu’il n’est pas l’employeur. Souvent liée à l’hégémonie d’associations mastodontes, cette souffrance au travail qui met en danger l’accompagnement devient l’ordinaire de bien des travailleurs sociaux.

Myriam Léon