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MNA : seul l’aspect comptable s’affine

Le 16 mai, après plusieurs mois de discussions, le bureau de l’Assemblée des départements de France (ADF) a fini par accepter les propositions du Premier ministre concernant le financement de la prise en charge des mineurs non accompagnés (MNA).

Il précise dans un communiqué que l’« État propose une aide concentrée sur la phase d’accueil et d’évaluation, avec 500 euros par jeune à évaluer plus 90 euros par jour pour l’hébergement pendant 14 jours puis 20 euros du 15e au 23e jour ». Ce soutien financier s’accompagne d’une atténuation du dispositif « Cazeneuve » d’aide de 30 % des frais d’ASE au-delà de 13 008 mineurs.

D’autre part, les membres du bureau prennent acte de l’accord du gouvernement de sortir les dépenses liées aux MNA des bases de calcul du plafond d’augmentation des dépenses de fonctionnement et souhaitent que cette décision soit rétroactive à 2015. Enfin, ils regrettent que cette proposition ne soit pas à la hauteur des attentes des départements et notamment de la charge financière qu’ils assument, soit 1,25 milliard d’euros en 2017.

20 euros = une chambre d’hôtel sans accompagnement

« La bonne nouvelle c’est que la prise en charge des mineurs non accompagnés reste de la responsabilité de l’Aide sociale à l’enfance et ne bascule pas vers le ministère de l’Intérieur comme on a pu le craindre, réagit Corine Torre, responsable de la mission France de Médecin sans frontière. Mais sur le fond, il n’y a rien. Il faudrait uniformiser les évaluations de minorités qui divergent énormément d’un département à l’autre, interdire les réévaluations et imposer, pour déterminer l’âge du jeune, une période d’observation d’au moins 20 jours dans un dispositif de protection, et non les 4 à 5 jours actuels avec un interrogatoire à charge. »

Elle regrette une approche purement comptable qui n’aborde pas l’aspect social, le bilan de santé, la scolarité… « Vingt euros, c’est une chambre d’hôtel pourrie sans accompagnement », résume-t-elle. Rencontrée en décembre par des associations de soutien aux exilés, la ministre des solidarités et de la santé avait pourtant affirmé sa responsabilité en termes de standardisation des évaluations et d’accès au soin. « J’espère qu’elle va présenter un vrai plan », poursuit Corinne Torre.

Un financement loin des réalités

De son côté, Violaine Husson de la Cimade constate qu’il reste une énorme marge de progression pour accueillir dignement ces jeunes. « On s’attendait à un prise en charge plus importante, parce que là on est très loin de la réalité des coûts. » Actuellement, l’État apporte une aide de 250 euros pendant 5 jours.

Cette nouvelle proposition couvre 25 jours. « C’est déjà ça, mais dans la plupart des départements, l’évaluation a lieu après un mois et demi d’attente voire trois mois. En attendant, les jeunes sont livrés à eux-mêmes, et les conseils départementaux jouent sur le manque de moyens humains et financiers pour ne pas prendre en charge les MNA. »

L’association de défense des droits des étrangers souligne également que la dotation de l’État ne tient pas compte du temps nécessaire au recours. Actuellement, après avoir été débouté par une aide sociale à l’enfance cherchant à limiter les prises en charge faute de financement, un jeune sur deux obtient sa reconnaissance de minorité devant un juge. Un cercle vicieux que cette proposition ne va, a priori, pas enrayer. Et qui paye les tribunaux ?