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Asile : les violences subies par les femmes, une réalité invisible

On les pense en sécurité, une fois arrivées sur le sol français… Pourtant, une étude menée par France Terre d’Asile démontre qu’il n’en est rien (1). Les femmes demandeuses d’asile et réfugiées sont victimes de différentes formes de violences en France, le plus souvent invisibles. Réalisée sur une période de cinq mois en Île-de-France, la recherche a établi une typologie des violences subies par ces femmes et les facteurs de risque les rendant plus vulnérables. Elle recense également les bonnes pratiques existantes en matière de prévention et de protection.

L’exil : un facteur de risque majeur

Si les violences faites aux femmes sont malheureusement présentes dans toutes les cultures, contextes, catégories socio-économiques et à tout âge de la vie, certaines femmes y sont davantage exposées, comme les migrantes et les réfugiées. Elles sont victimes de multiples violences avant leur départ, lors de leur parcours migratoire et à leur arrivée dans le pays d’accueil « soit parce qu’elles sont en état de dépendance financière et juridique, soit parce que les femmes migrantes sans statut juridique sont plus vulnérables à la violence et à l’exploitation sexuelle sur le lieu de travail, mais également au trafic des êtres humains. » (2)

Précarité et instabilité administrative, facteurs de vulnérabilité

Les conditions d’accueil insuffisantes ou non adaptées ne permettent pas de mettre ces femmes en sécurité et les exposent à la violence de la rue, et aux rapports sexuels dits de survie ou transactionnels. Dans les politiques publiques les femmes sont également les grandes oubliées, leurs besoins spécifiques ne sont pas pris en compte et sont un terrain favorable aux agressions au sein même des centres d’accueil.
L’attente de leur régularisation les fragilise économiquement car elles ne peuvent pas subvenir à leurs besoins de base et peuvent être victimes d’exploitation. S’ajoute à cela la peur de la dénonciation aux services de police, liée à leur statut.
L’isolement sur le territoire français vécu par ses femmes renforce leur vulnérabilité. Avec leur parcours migratoire elles ont perdu leurs repères et leur entourage, et doivent s’adapter à une nouvelle société où la langue peut être une véritable barrière. Les problèmes de santé, le handicap ou le jeune âge peuvent accroître les situations de violences envers elles.
Les violences psychologiques sont subies dans la rue ou dans les transports, souvent en rapport avec leur couleur de peau, les violences physiques dans la rue ou par leur conjoint. Mais c’est la violence et l’exploitation sexuelle qui est la plus représentée : proposition d’échanges, viol, prostitution forcée, réseaux de traite.

Prévention et protection, encore de nombreuses entraves

L’invisibilisation ainsi que la banalisation des violences faites aux femmes entravent la prise en compte du phénomène et donc la protection des victimes. Le rapport pointe également un défaut de formation des professionnels et le manque de travail en réseau avec des associations spécialisées.De la parole des femmes elles mêmes, il n’existe que très peu d’espaces d’informations et d’échange, notamment sur les recours.

Bonnes pratiques et recommandations

  • Des campagnes de prévention sont primordiales et souvent menées par des associations (La Cimade, Ligue des droits de l’Homme etc.).
  • La mise en place d’actions avec les femmes pour qu’elles recouvrent leur autonomie et leur pouvoir d’agir est au cœur des solutions proposées par les associations : groupes d’échanges, cours de français, création d’associations de défense des droits des femmes.
  • Du côté de l’intervention des professionnels : former et informer les intervenants auprès des femmes, proposer une approche multidisciplinaire des accompagnements et travailler en réseau est essentiel.
  • Proposer un hébergement suffisant et adéquat est une condition première à leur sécurité

(1) Les violences à l’égard des femmes demandeuses d’asile et réfugiées en France, France Terre d’Asile, Les cahiers du social n°40, avril 2018.

(2) Parlement européen, Commission des droits de la femme et de l’égalité des genres, Rapporteure : Rodi Kratsa-Tsagaropoulou, Rapport sur l’immigration des femmes : le rôle et la place des femmes migrantes dans l’Union européenne (2006/2010(INI)), 2006