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La loi Asile et immigration adoptée en première lecture

Dimanche 23 avril, Assemblée nationale. Après sept jours de débats et un millier d’amendements, la loi Asile et immigration vient d’être adoptée en première lecture (228 pour, 139 contre, 24 abstentions). En juin, le texte ira devant le Sénat, politiquement dominé par Les Républicains, qui ont promis « de l’amender considérablement »… Malaise palpable : une centaine de députés LREM n’ont pas pris part au vote. Le texte est violent : il réduit à six mois, contre onze aujourd’hui, l’instruction de la demande d’asile ; double la durée maximale de rétention, la portant désormais à 90 jours ; maintient la possibilité d’y maintenir des enfants (ce que le Défenseur des droits a récemment dénoncé) ; réduit de moitié le délai d’appel à 15 jours après rejet d’une demande d’asile… Etc.

Quelques miettes positives

Les rares évolutions législatives pouvant sembler positives le sont-elles vraiment ? Les demandeurs d’asile pourront travailler dès six mois suivant leur entrée sur le territoire français, contre neuf actuellement ; le « délit de solidarité » peut paraître assoupli ; les heures de cours de français pour les demandeurs d’asile seraient doublées ; les États réprimant l’homosexualité enfin exclus de la liste des pays sûrs… À noter aussi l’amendement Emmaüs, retenu : un titre de séjour temporaire pour motif exceptionnel sera accordé après trois années de présence active dans une communauté…

Quid du délit de solidarité ?

Mais tout cela reste aux marges, et certains points sont à relativiser : ainsi, le risque ne disparaît pas tout à fait qu’une personne puisse être poursuivie pour un acte de solidarité. Seule l’absence de contrepartie lucrative doit suffire à assurer l’immunité des personnes, militantes ou simplement citoyennes, apportant une telle aide. L’amendement gouvernemental, auto-qualifié de « ligne juste et responsable » se situe, selon le GISTI, « entre l’immunité des aides quotidiennes et la sanction de "toutes celles qui voudraient détourner la volonté de l’État de contrôler les frontières". Que ceux qui s’inquiètent de la difficulté à discerner ces intentions se rassurent : une circulaire adressée aux instances judiciaires en précisera les contours », prévient, pessimiste, l’association.

Recul des droits

« Texte dangereux », déplore la Cimade, qui y voit l’amplification « des pratiques déjà fortement attentatoires à la dignité et aux droits fondamentaux des personnes étrangères ». « Jamais une loi n’avait signé un recul si important en matière de droits. Fustigée à l’international pour sa politique à l’encontre des personnes migrantes, la France inscrit pourtant, avec le vote de cette loi en première lecture à l’Assemblée, sa dérive dans la loi. », insiste quant à lui le groupe Europe Écologie les Verts (EELV). Amnesty international estime que le débat « n’a pas évité les amalgames de toutes sortes, notamment avec les questions sécuritaires », et qu’une « épée de Damoclès » reste « au-dessus des militants, citoyens et organisations qui agissent pour le respect des droits humains ». Tout n’est pas terminé : les associations craignent encore un « détricotage » des maigres avancées, de la part du Sénat, en juin. Tout laisse à penser en effet qu’il sera réexaminé dans un sens plus restrictif encore.