L’Actualité de Lien Social RSS

12 septembre 2022

🎥 CINÉ • Autisme after punk

Dans un institut médico-éducatif accueillant des adolescents autistes, un éducateur musicien forme un groupe — 4 chanteurs, 4 musiciens —, un vrai, qui tourne dans les festivals et sort son troisième album. Attention, ça décoiffe.

Traduire en mots ses effrois : ainsi, Aurélien ne voit pas de rapport entre une pomme croquée et un smartphone, « et ça m’angoisse », rugit-il au micro. Les textes sont intimes et travaillés, y compris au moyen d’ateliers d’écriture. Kevin, lui, dans la chanson Le Cachet, s’emporte : « le cachet m’empêche de lire et de réfléchir, ça m’emmerde, le médicament, et ça pourrit mes dents ; la pilule bleue, quand je vais l’arrêter ? ».

Rock qui tâche

Pour les accompagner, une batterie plein rock, des guitares énervées, dont celle tenue par Christophe, l’éducateur. Ambiance post punk, poésie chaotique — et surréaliste —, attitudes scéniques charismatiques, délires signifiants et amour des mots, tout y est. Derrière l’autiste, l’artiste — dûment déclaré à la SACEM —, sans démagogie aucune. Lorsque le groupe est invité à l’Élysée, Christophe ne veut surtout pas qu’ils se calment et leur enjoint, devant Brigitte Macron et ses hommes cravatés, de rester totalement eux-mêmes.

Vrais pros

Leur groupe, c’est Astéréotypie, qui se produit ici et là. La cinéaste les a rencontrés fortuitement en 2015, en les écoutant au Sonic Protest, festival de musique expérimentale, au Cent-Quatre à Paris. Ils ont récemment couru plusieurs festivals, dont le Festival Psy de Lorquin et sont prévus, ces jours-ci, à Nancy, à Laval et à la Fête de l’Huma. Leur dernier album, paru tout récemment, s’intitule Aucun mec ne ressemble à Brad Pitt dans la Drôme !

Inclusion, musicothérapie ?

Inclusion, musicothérapie ? Surtout pas. Tout au long du documentaire, preuve est faite que nous sommes en présence d’un gang de musiciens, bien sûr atypiques, mais surtout porteurs de génie dans leur travail sur les mots et les airs. Certes, les éducateurs doivent parfois, dans les répétitions, recadrer sur la concentration ou gérer un trop-plein d’émotions — ainsi Kevin, dont le besoin de « gérer son cri » est évident —, mais ils sont bel et bien, avant tout, au service de leur création commune. De leur art.

Tiens, le Papotin…

Et comme tout cela manque de filles, ils accueillent Claire, du fameux Papotin, qui « aspire » les textes de heroic fantasy ou de romans à l’eau de rose, les digère et les mixe avant de les expectorer sur scène. Les colères, angoisses, désirs des artistes ont trouvé leur langage… d’ores et déjà salués par la critique.

Joël Plantet

L’énergie positive des dieux

Un documentaire de Lætitia Møller. 70 mn.

Sortie 14 septembre.

astereotypie.bandcamp.com