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► LE BILLET de Vince • ZAD (1)

Est-il encore permis de rêver dans le travail social ?
À l’heure où les nouvelles pratiques managériales perturbent considérablement le sommeil de nombreux travailleurs sociaux, rien n’est moins sûr.
Un rêve rentre difficilement dans un tableau excel. La fameuse « crise du recrutement » n’est pas tant liée à une affaire de prime Ségur qu’à une perte de sens dans nos actions. Alors, comment réenchanter le social ? Comment s’affranchir des cadres qui emprisonnent la créativité éducative ?
À défaut de pouvoir réellement s’affranchir des protocoles frustrants qui conditionnent nos pratiques aujourd’hui, je propose une alternative clairement disruptive : la création d’une ZAD (1) d’exercice. L’acronyme est devenu le symbole d’une forte opposition sur le terrain devenue pour ses participants une ultime solution idéologique d’opposition au projet social établi. Il s’agit d’occuper l’espace, de marquer un territoire, de matérialiser clairement le refus d’un aménagement jugé inadapté. La ZAD représente un type de conflit entre acteurs pour des usages contradictoires de l’espace, mais plus largement autour d’un modèle de société. Les zadistes contestent ainsi les logiques capitalistes et marchandes d’un système. Ils développent des stratégies illégales d’occupation et mettent en place des moyens de lutte symboliquement forts.
L’idée d’une ZAD du social n’est pas seulement celle d’une résistance. Elle vise un idéal, elle permet des expérimentations constructives visant à proposer de nouveaux modèles, dans de nécessaires prises de risques. Beaucoup de projets de ZAD émergent devant les machines à café, sans prendre forme.
Je propose la création de lieux de vie ZAD dans un projet d’émancipation de l’existant, dans des dynamiques transversales, innovantes et libres. Je suggère la création de laboratoires éducatifs où les travailleurs sociaux pourront enfin exprimer leurs potentiels créatifs à ciel ouvert face à un horizon dégagé des obstacles au cheminement. Cette idée nécessite une déconstruction des habitudes robotiques ou mécaniques de nos agirs professionnels, une émancipation franche des contraintes institutionnelles en vigueur, une énergie collective indispensable au service d’un nouveau paradigme.
Utopique ? Rêveur ? Irréaliste ?
Oui, j’assume. Je plains réellement ceux qui ne rêvent plus le travail social, ceux qui n’espèrent pas le changement, ceux qui n’osent pas prendre de risques, ceux qui se taisent, ceux qui se sont résignés aux dispositifs qui les font souffrir. Réveillez-vous ! Nos métiers s’éteignent. Pour retrouver la flamme, il faut accepter le risque d’incendie et oser s’aventurer loin des sentiers battus, sortir du confort de la plainte, proposer, inventer, explorer…
Écrivez vos projets. Formalisez vos intentions. Élaborez de la pensée. Nous avons besoin d’un idéal collectif où les possibles deviennent des objectifs. Quelle société voulez-vous ? Pour peu que vous ayez l’ambition de donner vie à vos rêves, je veux bien vous rejoindre sur vos ZAD.


(1) Zone A Défendre.