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■ ACTU - Marseille : l’occupation temporaire en BD

Pour sortir de l’invisibilité, l’association marseillaise Just publie une bande dessinée sur deux foyers atypiques : l’Auberge marseillaise et le Saint-Bazile.

L’un accueille des femmes vulnérables dans une ancienne auberge de jeunesse. L’autre met à l’abri des demandeurs d’asile dans un immeuble vacant en le squattant avant d’obtenir une convention d’occupation temporaire. Dans les deux structures, l’autogestion et l’autosupport se trouvent au cœur du projet avec des modalités très différentes.



Pendant un an, deux auteur(e)s et scénaristes de bandes dessinées, Iris Pouy et Clément Xavier ont observé ces aventures humaines au fil des rencontres. Ils en tirent deux récits croisés. ©Myriam Léon

Lors de sa découverte de l’Auberge marseillaise, Iris s’immerge dans un nouveau concept d’accueil qui fête sa première année. Accompagnées par un collectif de neuf associations, une trentaine de femmes et leurs enfants vivent là depuis mars 2021. « La rencontre a commencé par les enfants attirés par mes dessins puis les mamans les ont rejoints », raconte lIris Pouy. Pour l’encourager, l’une d’elle lui glisse à l’oreille : « Ils sont bien tes photomatons. »



Jusq’au 1er juillet, la sortie de la bande-dessinée donne lieu à une exposition sur le toit d’une structure sociale installé dans un tiers lieu à Marseille : Coco Velten. ©Dessins Iris Pouy/Myriam Léon

Par une série de portraits en situation et de petites touches de texte, ce récit offre de partager la vie du lieu, les histoires des enfants, les rigolades en cuisine, les rêverie dans le jardin... « L’intéressant dans cette structure, c’est qu’elle soit autogérée. Chaque mardi, elles se réunissent en agora et tiennent un conseil où elles discutent de la vie quotidienne et de l’organisation de projets. »

Vingt cinq professionnels, travailleurs sociaux, animateur, paysan urbain, veilleur de nuit… accompagnent tout de même le collectif.



Alieu Jalloh devient le héros de la BD pour incarner le long combat pour obtenir le droit d’espérer un avenir. ©Dessins Clément Xavier

À Saint-Bazile, du nom de la rue où se trouve l’immeuble, la gestion se fait totalement par les habitants avec le soutien d’Alieu Jalloh, régisseur social chez Just. « Ce qui m’a flashé c’est l’inventivité, l’audace de se lancer dans un projet qui, in fine, paraît évident », explique Clément Xavier.

En fait des exilés laissés à la rue par les autorités françaises censées les hébergés ont, avec le soutien de solidaires, réquisitionné un immeuble vacant du centre ville. Ensuite, il en ont pris soin, l’ont rénové, sécurisé et se sont organisés pour retrouver leur dignité.



Après avoir monté l’association des Usagers de la Pada (AUP), le demandeur d’asile organise un groupe d’autodéfense juridique contre l’administration. ©Dessins Clément Xavier

« Cette histoire m’a redonné de l’énergie, constate le dessinateur reporter. Mais j’ai senti que les gens avaient été très sollicités par les médias, ils avaient besoin que l’on préserve leur intimité, donc Alieu Jalloh a pris la main du récit. »

Il nous entraine donc dans son parcours de migration semé de violences physiques, psychiques et administratives, jusqu’à l’obtention du statut de réfugié.


©Dessin Clément Xavier

Il nous raconte aussi le combat pour obtenir une reconnaissance de leur capacité à s’organiser et obtenir une convention d’occupation temporaire. Là, les association Just et Habitat alternative et social (HAS) ont permis la rencontre et pris la responsabilité de ce montage pas tout à fait orthodoxe.

Depuis, Saint-Bazile a été restitué à son propriétaire comme convenu, mais l’idée a démontré sa faisabilité. D’autres projets semblables devraient suivre. L’occupation temporaire à visé solidaire entre dans les moeurs à Marseille.

Avec cette bande dessinée, la volonté de Just est de montrer de manière esthétique le champ des possibles quand le social s’appuie sur la capacité d’autosupport des personnes en difficulté.

Myriam Léon


Pour chaque commande de la BD à la Réserves à bulles, les 5 euros de la vente vont à une caisse de solidarité pour soutenir Just dans ses projets de réduction des inégalités.

À lire aussi sur ces deux projets dans Lien Social n°1324 : Droit d’asile • Un CADA autogéré fait jurisprudence et dans le n°1304 : Occupation temporaire • Remplir les vides