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📝 Tranche d’éduc’ : Syndrome de l’institution.

Avant lui je connaissais le syndrome de Stockholm, de l’imposteur, de DiogĂšne, d’Asperger et mĂȘme de Peter Pan et voilĂ  que j’en dĂ©couvre un nouveau... Et pourtant, mon ignorance aurait prĂ©fĂ©rĂ© ĂȘtre prĂ©servĂ©e.

PlacĂ©, dĂ©placĂ©, replacĂ© chez nous depuis un an, ce p’tit gars de dix ans erre sans but. BallottĂ© d’unitĂ©s en services, cabas en main, il vivote et feint d’aller bien. Pourtant ses yeux s’assombrissent, son petit ventre s’arrondit, ses mots se brouillent, ses gestes s’empĂątent, sa force s’amoindrit, sa volontĂ© n’est plus.

Tout sourire et plein d’entrain, son arrivĂ©e fut pourtant pĂ©tillante. Projets en tĂȘte et tĂȘte en l’air, il souhaitait enfin vivre une vie de petit garçon ordinaire. Il se rĂȘvait footballeur, anticipait ses sorties entre amis, se projetait dans une scolaritĂ© riche en curiositĂ©, loin de de son monde de terreur.

Mais un jour il nous dit :
"vous aviez promis qu’ici on allait ĂȘtre protĂ©gĂ©. Vous aviez dit que les adultes d’ici Ă©taient lĂ  pour nous aider Ă  grandir. Vous m’avez donnĂ© une chambre et une nouvelle maison. Et pourtant..."

Et pourtant, ici aussi, il a croisé le chemin des violences.
Celles qu’on appelle ordinaires, celles qui sont invisibles et incisives, celles qui sont aussi teintĂ©es de coups bien rĂ©els, celles qui font mal et tirent de lourdes larmes.

Il y croyait Ă  ce tableau d’Ă©ducation sans encombre. Il l’a touchĂ©e des mois durant ce beau dessein tant espĂ©rĂ©. Il s’y est pris au jeu de l’innocence retrouvĂ©e et s’est blotti un temps durant dans ces bras rassurants de l’institution protectrice. Mais pourtant.

Mais pourtant son passĂ© l’a rattrapĂ©, il a dĂ» dĂ©noncer, accuser, enfermer, ses parents malveillants espĂ©rant trouver une Ă©paule rĂ©confortante dans cette nouvelle vie promise.
Et les promesses furent vaines.

L’Ă©tablissement va mal. Et lui avec.
Le personnel décroche. Et lui aussi.
Les adultes pleurent un systÚme insécurisant. Et lui gémit.
Les professionnels déraillent. Et lui, subit.

Ses figures d’attachement outrepassent les limites, ses rĂ©fĂ©rences quotidiennes perdent en contenance, ses repĂšres Ă  peine investis s’Ă©croulent le laissant seul avec ses troubles et ses blessures.
Petit homme démuni réagit en violence.
Les adultes payent la confiance envolée par des coups incessants.
De pompiers en HP, petit gars est soigné. Et pourtant.

Pourtant son esprit s’emmĂȘle, il frĂŽle la folie.
Son corps s’Ă©paissit, il ne cesse de se remplir.
Ses dĂ©sirs s’inhibent, il erre de mal en pis.
Son monde se plaint, quand lui se vide.

Le foot est Ă  l’arrĂȘt.
L’Ă©cole est en suspens.
Sa chambre est désertée.
Sa réorientation est amorcée vers un lieu plus adapté.
Et pourtant. Il porte le syndrome de l’institution... En souffrance, insĂ©curitĂ©, errance, fragilitĂ©.

L’adulte protecteur
Devient bourreau impuissant.
L’enfant doux rĂȘveur
Devient pantin impotent.
La sĂ©paration doit ĂȘtre actĂ©e pour qu’il puisse enfin se retrouver.