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📝 Tribulations d’une assistante sociale de rue ‱ VulgaritĂ©s de dĂ©part #2

Quelques mois aprĂšs un premier billet portant le mĂȘme titre (1), me voici Ă  nouveau Ă  Ă©crire sur la question du dĂ©part. Cette fois-ci, il ne s’agit pas de celui d’un collĂšgue cher mais bien du mien. De toute ma carriĂšre, je n’étais pas restĂ©e aussi longtemps au sein d’un mĂȘme service et ce, pour de multiples raisons.
Je n’ai jamais autant vibrĂ© dans mon travail qu’avec vous, chers collĂšgues. Effectivement, le panel des Ă©motions que j’ai traversĂ©es au cours de ces quatre derniĂšres annĂ©es est extrĂȘmement large : peurs, profondes remises en question, doutes, Ă©clats de colĂšre ou de rire, ravissements, peines, fiertĂ©s, joies et amusements !
Il y a eu peur, quand je t’ai vu chuter du canoĂ© dans un rapide sans te relever ou quand j’ai Ă©tĂ© menacĂ©e, Ă  quelques reprises, par les personnes accompagnĂ©es. A mes dĂ©buts, j’ai connu de profondes remises en question lorsque vous me criiez que je n’étais pas positionnĂ©e correctement dans les accompagnements ou dans la vie de l’équipe. Par la suite, j’ai rencontrĂ© le doute alors que nous orientons des jeunes sur des dispositifs que nous ne pensions pas adaptĂ©s Ă  la situation mais faute de mieux, nous ne pouvions rien faire de moins. Les Ă©clats, quant Ă  eux, font partie intĂ©grante du quotidien de cette Ă©quipe, qu’ils viennent du public ou qu’ils soient entre nous, ils sont nĂ©cessaires pour dĂ©samorcer certaines mĂ©sententes ou pour amoindrir la violence que peut nous provoquer notre travail. Il y a eu ravissements lorsque vous me faisiez dĂ©couvrir de nouveaux modes d’intervention, tels que le travail de rue, l’aller-vers ou la pluridisciplinaritĂ©. Nous avons aussi connu des peines aux dĂ©parts de collĂšgues qui quittaient la famille que nous formions. Les fiertĂ©s sont apparues aprĂšs quelques annĂ©es d’accompagnement, quand il devenait Ă©vident que notre intervention n’avait pas Ă©tĂ© veine. Puis la joie faisait frĂ©quemment irruption dans notre quotidien, lorsque des situations extrĂȘmement prĂ©caires se dĂ©bloquaient aprĂšs un travail interdisciplinaire acharnĂ©. Enfin, l’amusement nous permettait souvent de partir plus lĂ©gers en week-end aprĂšs une longue semaine. De tous ces tumultes sont nĂ©s de profonds liens d’amitiĂ© qui, je l’espĂšre, perdureront.

Alors il n’y a que du bon Ă  prendre de ces annĂ©es parmi vous, puisque j’ai tellement appris et que j’en pars grandie, adulte dans la profession. La suite m’est inĂ©vitable, il s’agit maintenant de parcourir seule mon propre chemin. Pourtant, vous serez avec moi dans chaque intervention que je mĂšnerai, grĂące Ă  vos transmissions et Ă  nos multiples Ă©changes de pratique.
Seule une chanson peut amoindrir les vulgaritĂ©s, qui me viennent Ă  nouveau, pour vous faire entendre mes pensĂ©es : « Mes chers collĂšgues, je pars ! Je vous aime mais je pars ! Je ne m’enfuis pas, je vole ! » (2). Pour conclure, je ne vole que grĂące Ă  vous !

Votre vulgaire.


(1) VulgaritĂ©s de dĂ©part, paru le 23/03/2022 (2) Je vole – la famille BĂ©lier, Louane (oui je prĂ©fĂšre citer cette version que l’autre)

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- Archives - Travail social
- Archives - PrĂ©vention spĂ©cialisĂ©e