N° 943 | Le 1er octobre 2009 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)

Enfants bandits ? La violence des 3-13 ans dans les banlieues

Sonia Imloul


éd. Panama, 2008 (158 p. ; 15 €) | Commander ce livre

Thème : Violence

« Il n’y a pas d’enfant délinquant. Il n’y a que des enfants violents qui risquent, en grandissant, d’évoluer vers la délinquance » (p.77), affirme l’auteur. Sonia Imloul en convient : on ne peut interpréter de manière prédictive les agissements destructeurs dont on peut être témoin chez les tout petits. Ce qui ne signifie pas pour autant qu’il faille renoncer à toute prévention, quand on y est confronté. Les enfants qu’elle appelle « bandits » sont avant tout en souffrance, proclame-t-elle. Quand ils volent, cassent, blessent et violent, ils ne font que traduire une situation familiale insupportable ou un contexte social dégradé qui les conduit à exprimer, à leur façon, leur détresse et à reproduire ce qu’ils vivent quotidiennement. Comprendre les circonstances qui expliquent leurs passages à l’acte ne signifie pas en faire un tabou.

C’est Aziz, quatre ans, qui ne supporte pas qu’on lui demande de prêter un objet à un autre enfant : il le brise alors, avant de lui jeter les débris à la tête. C’est Bemba, sept ans, qui explique pourquoi ses vêtements sentent l’essence à son arrivée à l’école : ses frères lui ont confié la mission de se glisser entre les barreaux de l’entrée d’un parking, avec un jerrycan et des allumettes pour aller incendier des voitures. C’est Koné, huit ans, qui, très en colère, s’en prend aux voitures garées devant l’école, contraignant le directeur à appeler la police qui vient l’interpeller, sans que cela ne semble l’émouvoir particulièrement. C’est Greg, dix ans, qui agresse son animatrice, en tentant de l’étrangler, parce qu’elle lui a demandé de ranger ses affaires. C’est Massy, douze ans, qui a tailladé, en pleine classe, le visage d’un autre élève, avec un cutter.

Sonia Imloul propose toute une série de mesures pour faire face à ces manifestations précoces. Certaines ne peuvent qu’entraîner un large consensus : intégrer aux programmes scolaires, de la maternelle au collège, des ateliers hebdomadaires sur la gestion de la violence, rendre l’école obligatoire dès trois ans (pour favoriser la socialisation), rendre gratuit l’accès aux centres de loisirs ainsi qu’à la cantine, réhabiliter les internats scolaires, assurer la présence d’une équipe pluridisciplinaire dans les écoles, à disposition des familles en difficulté.

D’autres propositions sont bien plus sujettes à caution, tant elles jettent le discrédit sur les familles : prime de rentrée scolaire sous forme de bons d’achat (pour éviter l’utilisation à d’autres fins), renforcement de la lutte contre la polygamie, repérage des familles à risque pour assurer la prévention des dérives, éloignement géographique des jeunes perturbateurs et pourquoi pas de leurs parents…

Cet ouvrage montre comment, avec de bonnes intentions de départ, on peut en arriver à des solutions qui relèvent du meilleur comme du pire.


Dans le même numéro

Critiques de livres