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Chibanis • Une fausse bonne nouvelle

Les Chibanis et Chibanias, « cheveux gris » en arabe, pourront retourner longtemps dans leur pays d’origine et retrouver leurs proches sans craindre de perdre leurs prestations sociales en France. Voilà comment communique le ministère des Affaires sociales autour du décret publié au Journal officiel du 6 octobre dernier, attendu depuis la loi DALO de 2007 et qui met en place une « aide à la réinsertion sociale et familiale » des personnes immigré(e)s retraité(e)s. Aujourd’hui, risquant de perdre l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) – conditionnée à six mois de résidence en France par an minimum – et l’allocation logement notamment – huit mois en France minimum – les Chibanis renoncent souvent à cette possibilité. La nouvelle aide se substituera donc en janvier 2016 à ces prestations, pour un montant minimal de 600 euros par an pour les personnes aux ressources annuelles comprises entre 6 000 et 6 600 euros, et un montant maximal de 6 600 euros par an, soit 550 euros par mois, pour les ressources inférieures à 600 euros. Mais les conditions pour en bénéficier sont tellement restrictives qu’elles ne concerneront que 500 personnes, estime le Gisti, loin des 35 000 annoncées par le ministère. « L’idée de départ n’est pas mauvaise, consistant à faciliter les aller-retour de ces personnes qui sont d’ici et de là-bas, et donc à respecter leur droit à la liberté de circulation, explique Antoine Math, membre du Gisti et chercheur sur les questions sociales et économiques. Mais avec des conditions telles que vivre en foyer – ce qui exclut ceux qui, comme à Marseille, vivent dans des hôtels meublés- et retourner au pays six mois par an et plus – ce qui conduira à la perte totale des droits sociaux en France – ce dispositif est ridicule. Il vise à réaliser des économies avec le retour définitif des personnes dans leur pays d’origine ». Salah Amokrane, coordinateur général de l’association toulousaine Tactikollectif, qui s’est fortement mobilisée via le collectif « Justice et dignité pour les chibani-a-s », voit lui dans ce décret « plutôt un progrès, mais qui va concerner peu de monde et qui reste à la marge par rapport à la situation générale des Chibanis, à qui la CARSAT continue à réclamer des trop-perçus et qui peinent à accéder à leurs droits sociaux ». L’heure de la fin de l’« injustice » envers ceux « qui ont tant apporté à la France », selon les mots du ministre de la ville Patrick Kanner lors de la publication du décret, n’a donc pas encore sonné.