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Calais • Alerte de la Contrôleuse générale des lieux de privation de liberté

« Vider la jungle ». Pour la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté, Adeline Hazan, l’objectif des transferts groupés de réfugiés de Calais, vers des centres de rétention partout en France, est clair. Elle utilise un outil rare, qui marque la gravité des faits constatés : la recommandation en urgence, publiée ce 2 décembre.
En juillet 2015, lors d’un contrôle aléatoire du centre de rétention administrative de Coquelles près de Calais, les contrôleurs du CGLPL observent « une pratique de transferts groupés de personnes, au total 91 personnes depuis le mois de juin 2015 au rythme de cinq par jour ». Les retenus sont envoyés vers d’autres centres de rétention, pourtant celui de Coquelles n’est pas complet.
Quelques mois plus tard, la CGLPL est alertée de la mise en place d’un dispositif, depuis le 21 octobre – date de la visite de Bernard Cazeneuve à Calais – qui, cette fois, gagne de l’ampleur : entre 19 et 52 personnes sont déplacées quotidiennement vers 7 CRA : Metz, Marseille, Rouen- Oissel, Paris-Vincennes, Toulouse Cornebarrieu, Nîmes et le Mesnil-Amelot. Un dispositif dénoncé par de nombreuses associations.
Ces personnes sont transférées directement depuis le commissariat de Coquelles. Elles y sont retenues suite à une vérification d’identité ou placées en garde à vue pour avoir tenté une intrusion dans la zone contrôlée de l’Eurotunnel.
La CGPL organise trois visites, deux au commissariat de Coquelles et l’un à Paris-Vincennes qui confirment l’existence de cette pratique : le 27 octobre, 46 personnes sont envoyées en avion du commissariat vers le CRA de Nîmes. Dans sa recommandation, la contrôleuse constate que le droit des personnes n’est pas respecté et ces transferts ne sont pas conformes aux textes qui cadrent la rétention administrative. Adeline Hazan appuie sur « les conditions indignes pour les personnes concernées comme pour le personnel » : accueillis dans des préfabriqués de l’hôtel de police, les personnes sont parfois quatre dans des cellules de 7,40 m2, treize dans une cellule collective de 11m2 sans autre équipement que deux bat-flanc en béton, sans WC, ni point d’eau…
L’accès aux droits est lui totalement bafoué : pas d’information individualisée, des procédures « rédigées de manière stéréotypée voire similaire », des obligations à quitter le territoire distribuées à la pelle sans indication précise du pays de retour…
Dans sa réponse à la CGLPL, le ministre de l’Intérieur assure que depuis le 1er novembre, l’ampleur de ces transferts groupés a diminué - actuellement une dizaine de personnes seraient transférées chaque jour.
Adeline Hazan reste ferme et demande l’arrêt de cette pratique « dont l’intention n’était pas d’éloigner les personnes mais uniquement de désengorger Calais ». Un dispositif illégal et qui n’atteint même pas son but officiel puisque les personnes retenues ne peuvent être renvoyées vers leurs pays d’origine que sont la Syrie, l’Afghanistan, l’Erythrée et le Soudan. Sur les 779 personnes retenues entre le 21 octobre et le 10 novembre, 518 ont été libérées et… sont retournées à Calais.