Caen : le cri d’alerte de la maraude de nuit

« Nous sommes des inconditionnels de l’accueil inconditionnel, explique Nicolas Martine, éducateur spécialisé dans l’équipe de maraude du service Trait d’union, de l’association ACSEA à Caen. Nous ne voulons plus voir notre association s’asseoir sur ses valeurs humanistes dès que le financeur, la Direction départementale de la cohésion sociale (DDCS), le lui demande. » Ces professionnels se mettent en grève cette nuit pour témoigner « de l’incapacité croissante de mener à bien la mission qui est la leur : mettre à l’abri les plus vulnérables », en l’occurrence des personnes mineures isolées.
Dans ce département comme dans d’autres, certains mineurs isolés sont déclarés majeurs au faciès et ne bénéficient pas de la protection légale au titre de l’Aide sociale à l’enfance (ASE). De l’autre côté, l’association ACSEA refuse de les héberger en s’appuyant sur leur déclaration de minorité, selon l’intersyndicale (CGT, SUD, FO, CFDT). « Je comprends que les équipes de terrain soient confrontées à des choix qui sont durs, mais je ne peux pas faire de l’hébergement sans financement et sans autorisation, se défend Dominique Roche, directrice générale de l’ACSEA, qui compte 1200 salariés. Nous souhaitons donc aller discuter avec le préfet pour faire des propositions. »

Des mineurs isolés
en zone de non droit

En attendant, l’intersyndicale dénonce dans un tract la double peine infligée à quelques centaines de personnes sur le département. « Sans attestation stipulant leur majorité, ces mineurs ne peuvent être hébergés par le 115 ni le service Trait d’Union, ni bénéficier d’accueil de jour, ni ouvrir de droits à l’Aide Médicale d’État, ni déposer une demande d’asile ou de titre de séjour…Sans statut officiel, les enfants sont alors livrés à eux-mêmes dans la rue, sans avoir aucune chance d’obtenir une solution de mise à l’abri par les services compétents. L’ambiguïté de la Direction de l’enfance et de la famille place le mineur dans une zone de non-droit, bloquant tout hébergement et le conduisant à dormir dehors ! » Ce mouvement, une première depuis le lancement de la maraude voici 19 ans, veut révéler cette situation critique, à l’aube de l’hiver.

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