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Voilà un excellent reportage sur les Compagnons du devoir (1). Cette confrérie, qui tend vers l’excellence, justifiait ce beau coup de projecteur. Certes, ses coutumes et usages peuvent apparaître quand même un tantinet suranné. Mais, ils véhiculent tant d’honnêteté, de respect et de fraternité qu’ils méritaient ce coup de projecteur. Naëlle, quant à elle, est touchante et attachante, mais son parcours interroge. Prisonnière d’une banlieue, une fois de plus présentée sous ses pires clichés, elle ne va devoir son salut qu’en entrant chez les Compagnons. Dommage que le scénario ne fonctionne que sur le mythe méritocratique : « tu as de grandes compétences, mais tu n’en n’as pas conscience ». Il suffit qu’une âme charitable te tende la main et te les révèles. Et ce sera Paul, Compagnon vitrailliste qui s’y colle. Elle n’en aurait pas, elle ne mériterait pas de s’en sortir ? « Si on veut, on peut » : ce sophisme traverse de part en part ce film, trouvant sa source dans la conviction néo-libérale prétendant que l’on serait toujours maître de son destin, indépendamment de tout déterminisme social. Un scénario imprégné de l’idéologie dominante de notre époque contemporaine qui semble s’ouvrir sur un avenir en apparence optimiste, mais en réalité qui camoufle les profondes inégalités de destin, renvoyant implicitement celles et ceux qui n’y arrivent pas à leur propre responsabilité.

Jacques Trémintin

(1) « Compagnon » de François Favrat