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✚ COMMUNIQUÉ -Covid19 et troubles psychiques : Les familles à l’épreuve de la réorganisation de la psychiatrie et du déficit abyssal de l’offre dans le social et le médicosocial.

La crise sanitaire sans précédent du Covid19 suscite d’importantes inquiétudes pour la continuité des soins, de l’accompagnement et l’effectivité des droits des personnes souffrant de troubles psychiques.
L’Unafam se mobilise pleinement pour accompagner les familles, confrontées à une profonde réorganisation des services hospitaliers et médico-sociaux ; car ces changements déstabilisent nécessairement le fragile équilibre sur lequel reposent à la fois la santé mentale des personnes et le système de la psychiatrie dans sa globalité.
Le risque d’une propagation importante de l’épidémie à l’hôpital psychiatrique.
La réorganisation en urgence du fonctionnement de l’institution hospitalière, avec la fermeture de l’accueil des patients dans les unités de jour, les sorties d’hospitalisation accélérées et la mise en place du confinement dans les services restant opérationnels, nécessite un engagement sans précédent du personnel hospitalier, que l’Unafam tient avant tout à souligner et à saluer.
Le risque d’une propagation de l’épidémie dans les hôpitaux psychiatriques est particulièrement important. Les personnes hospitalisées dans les unités de soins psychiatriques sont des patients « debout », au contact les uns des autres rendant difficile le respect des gestes barrières. De plus, ils présentent souvent des comorbidités, auxquelles il faut ajouter une difficulté à prendre en compte la douleur et exprimer leurs besoins en soins somatiques. Il est ainsi partout demandé à ce que ces patients, s’ils devaient être atteints du Covid19, restent dans les services de psychiatrie, dans des secteurs dédiés, sauf si leur état nécessite des soins de réanimation.
« Nous nous inquiétons évidemment de ce que le manque de moyens des hôpitaux psychiatriques ne pèse sur la capacité de l’hôpital à gérer sereinement cette crise : manque de gel, de masques, de tenues à usage unique mais aussi l’impossibilité de pratiquer un test systématique pour les patients entrants… ce manque de moyens vient s’ajouter à un déficit en ressources humaines préexistant, d’autant que les contaminations des soignants se multiplient » déclare Marie-Jeanne Richard, présidente de l’Unafam.
La continuité des soins et le respect des droits
Le confinement contraint dans les services hospitaliers qui restent ouverts, conduit à la suspension des sorties thérapeutiques, mais aussi des visites. Cela perturbe le quotidien des patients et leur lien avec leurs proches. L’Unafam salue les mesures prises par les hôpitaux pour tenter de maintenir ce lien essentiel, par des moyens dématérialisés : newsletters, numéros dédiés aux familles, autorisation de l’usage des téléphones portables et des connections internet…
La continuité des soins en ambulatoire par appels téléphoniques, soutien psychologique, téléconsultations médicales, visites à domicile… varie selon les hôpitaux. Cette crise est bien sûr révélatrice des inégalités territoriales en matière de soins et d’accompagnement en ambulatoire.
« Nous nous réjouissons que des pratiques innovantes se déploient en particulier lorsque l’entourage est impliqué et soutenu. Ces mesures prises pour pallier la crise ouvrent la voie à de nouvelles pratiques qu’il sera intéressant d’évaluer et pourquoi pas de conserver à la sortie de la crise », reprend Marie-Jeanne Richard.
L’Unafam insiste par ailleurs sur l’importance du respect des procédures notamment pour les soins sans consentement, alors que les juges des libertés ne tiennent plus audience, comme l’a souligné le Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté dans sa communication du 27 mars.
Les familles, dernier rempart d’un système en crise.
Le défaut de reconnaissance et donc de compensation du handicap psychique et de dispositifs d’accompagnement dédiés se fait plus que jamais sentir : en l’absence de ressources matérielles et d’aide, il n’existe en période de crise plus aucun répit pour l’entourage. Le manque de lieux d’hébergements ou de logements adaptés fait que beaucoup de malades, souvent seuls, étant dans l’incapacité de faire face au confinement ou d’aller acheter leur médicament ou de quoi se nourrir, ont dû revenir vivre dans leurs familles.
Ces familles sont évidemment en première ligne et souffrent d’une grande solitude face à la maladie de leur proche, dont les troubles peuvent être amplifiés par la situation actuelle. L’Unafam regrette ainsi que le Plan Blanc ait insuffisamment pris en compte l’urgence psychiatrique avec un numéro unique à appeler en cas de décompensation sévère ou de risque suicidaire : le 15 ne peut pas, aujourd’hui, absorber ces demandes.
En cette période de crise, l’Unafam reste plus que jamais présente auprès des familles via « Écoute Famille » et fait remonter les difficultés du terrain en apportant des réponses aux questions les plus fréquemment posées sur une page dédiée du site.
L’association fait également deux fois par semaine le lien avec la cellule de crise du comité de pilotage de psychiatrie.
Pour Marie-Jeanne Richard, « il faut se préparer à une crise longue, qui va profondément bouleverser le secteur psychiatrique. L’heure aujourd’hui est à la réponse à l’urgence : du matériel pour l’hôpital, l’organisation de l’ambulatoire, le soutien aux aidants, la mise en place de mesures d’urgence. Mais du positif peut aussi émerger : il faudra, le moment voulu, se poser les bonnes questions sur les moyens financiers et humains que l’on doit mettre sur la table pour un accompagnement de qualité et le respect des droits des personnes ».


LIEN SOCIAL n°1270 en accès libre