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► LE BILLET d’Olyric • Le petit pas de côté ….

Il est 17h. Une éducatrice arrive en courant à mon bureau, très énervée et heurtée.
Elle m’explique que Paul vient de lui mettre un coup de pied, qu’elle n’en peut plus, de lui…. Je lui propose de s’assoir, je vais tenter de comprendre et d’apaiser l’éduc mais aussi et surtout de comprendre…. On est en DITEP, avec des jeunes (adolescents agissants), avec des jeunes qui ont peu de mots, ou ne les trouvent pas, pour exprimer ce qui se passe en eux et ont la facilité de dégainer facilement….
L’éduc un peu calmée, me raconte qu’au moment du départ (séparation), Paul ne veut pas ranger la salle de jeux mais, par contre, veut partir vite, un bus à prendre et lui demande son téléphone (objet de lien).
Jusque-là, un grand Classique entre ce que ce jeune fait et peut faire et ses demandes.
Je demande à l’éduc ce qu’elle a dit, fait dans cette situation et là
Aïe aïe aïe !!!!
Elle se met dans l’encadrement de la porte et lui dit : « tu ne sortiras pas et n’auras pas ton téléphone, tant que tu n’auras pas rangé la salle de jeux...  »
Il est 17h, son bus est à 17h15, Paul est en panique intérieur et ne « peut pas » ranger maintenant…
En toute évidence, Paul force le passage, lui arrache son portable qu’elle tenait dans sa main, en lui filant un coup de pied et s’en va, en courant …..
Drôle de situation, cas d’école, cas clinique, une situation en analyse des pratiques très pertinente je trouve ….
L’éduc est toujours hors d’elle et n’arrive pas à passer sur le fait qu’il ait forcé le passage pour partir.
« Qu’auriez-vous fait  » me dit-elle ?
«  Eh bien, j’aurais tenté de dire à Paul que ok, tu ne peux pas ranger maintenant,
Pas disponible, trop compliqué par contre, dès demain matin, se sera ta première mission, de ranger afin de reprendre une autre journée et dans d’autre perspectives.
 »
« Et alors on le laisse faire ? »
« Je ne crois pas, on l’accompagne dans la réparation d’après, quand il sera en capacité de faire, qu’il puisse repenser la situation, avec vous.  »
« Donc, vous me dite qu’il faut que je diffère et que je reprenne demain avec lui ?  »
« Oui, c’est tout à fait ça, de reprendre avec lui, là ou vous vous en étiez arrêtés, garantie absolue que Paul sente que l’on tient bon, et le cadre et la sécurité de ce qu’il fait et doit faire. »
L’éduc apaisée, me regarde, moyennement convaincue et me dit : « si je comprends bien, j’aurais dû être et du faire autrement, dans une posture différente, décalée. »
Je lui réponds que dans sa question, il y a une grande part de la réponse mais que bien souvent, «  il est urgent de ne pas se presser  », ce qu’il n’enlève pas la réponse que l’on apportera au jeune quand il pourra lui aussi, l’entendre et se l’approprier…
Ps : Paul rangera dès le lendemain matin de lui-même, en s’excusant auprès de son éduc, en lui disant qu’il avait peur de rater son bus et que son téléphone lui permettait d’être en lien avec sa maman.