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► LE BILLET de Vince - What else ?

Ah si la machine à café pouvait parler, elle aurait tant d’histoires à raconter !
La machine ? Elle est située dans le hall du personnel en plein milieu du grand couloir du service ASE, pile-poil entre le bureau de Mireille et celui de Jean-Paul, tous deux travailleurs sociaux du même service.
Mireille, elle passe furtivement à la machine, parce qu’elle préfère sortir fumer sa clope avec son mug « super ASS ». Elle n’aime pas trop s’y éterniser parce qu’elle a l’impression que les plaintes interstitielles de ses collègues viennent se rajouter aux piles des dossiers cerfa de son bureau. De toute façon, depuis son retour de burnout, elle a ralenti sur le café. Elle préfère boire des tisanes détox dont les seules appellations invitent à la méditation. La clope aussi elle a essayé d’arrêter, au moins trente fois. Elle y revient systématiquement parce qu’elle est convaincue qu’elle a une fonction thérapeutique. D’ailleurs, Mireille milite depuis des années au sein du CSE pour des pauses-cigarette obligatoires, sans doute parce que les infusions « nuit paisible » ne suffisent pas à son repos. Mireille, elle sent la verveine chaude et le tabac froid. Heureusement, le Xanax n’a pas d’odeur.
Jean-Paul quant à lui, a fait de la machine à café sa partenaire idéale. Contrairement à Mireille, il la fréquente en permanence, à tel point qu’il y a entre eux une relation quasi fusionnelle. Jean-Paul a une telle réputation de coureur de jupons dans la boîte que les mauvaises langues disent de lui qu’il essaye même de pécho la machine à café. En tout cas, il aime lui étaler ses théories en prenant à témoin quelques collègues qui se sentent obligés de l’écouter. C’est une grande bouche Jean-Paul. Il n’a pas de filtre. C’est sans doute ce qui le distingue le plus de la machine à café et ce qui rend leur relation finalement si équilibrée, comme un bon arabica du Pérou. Cela dit, je ne sais pas comment il fait JP mais c’est le seul mec que le café n’excite pas du tout. Au niveau professionnel du moins, c’est bien son problème, sa productivité n’étant pas du tout impactée par sa conso de caféine.
Quoi qu’il en soit, la machine à café, c’est un peu la collègue idéale. Celle qui respecte ton rythme, ton engagement, tes valeurs. Celle qui t’accepte tel que tu es, sans jugement ni préjugé. Celle à qui tu peux, si tu veux, confier tes secrets ou raconter des ragots sans crainte qu’elle ne trahisse ta parole.
Mireille et Jean-Paul, ils ne peuvent pas se blairer. Le seul endroit où ils s’adressent la parole finalement, c’est devant la machine à café. Un peu comme un couple en conflit lors d’une séance de médiation familiale. Ici, on peut boire la tasse, sans se noyer.
 
Vince