🎥 Film - Filles de joie
Il devait sortir le 18 mars dernier. Filles de joie, de Frédéric Fonteyne et Anne Paulicevich, sera finalement sur les écrans ce 22 juin, premier jour de réouverture des cinémas.
Trois femmes traversent chaque jour la frontière belge pour se prostituer, façon d’échapper à l’austérité française et aux petits boulots sous-payés. Leur corps en arme de survie. Objet ou arme ? Ce film, en posant le corps des femmes comme central, questionne les rapports femme-homme. Corps magnifié, corps fatigué, violenté, instrumentalisé, la caméra s’attarde, les illumine ou les éclaire crûment.
- © Versus production : Les Films du Poisson
Borderlines, entre force de vie et noirceur extrême, ces trois femmes, superbement incarnées par Sara Forestier, Noémie Lvovsky et Annabelle Lengronne, mènent une double vie, passant du bordel belge – où la scénariste Anne Paulicevich s’est immergée pendant neuf mois – à leur quotidien de mères, d’épouses, de filles. « Je voulais depuis longtemps écrire sur l’héroïsme des femmes », livre la scènariste. Simulations d’orgasme, expériences sexuelles, fous rires, entre deux clients, les femmes entre elles se lâchent, forgent leur sororité, puissant bouclier contre la laideur du monde qui les entoure. « Oui, il y a de la joie en elles ! », assure le réalisateur Frédéric Fonteyne. La dureté du film pourrait nous en faire douter.
En retournant le stigmate qui voudrait les figer en victimes, elles font de leur corps - objet des hommes, réifié par leur désir sexuel, soumis par leur semblant de puissance masculine - une arme puissante. Les hommes n’ont pas le beau rôle, violents, bêtement mâles ou tristement éteints ; ils glissent au fil du film de sexe fort à sexe faible.