Séjour pour soins • Un droit fragilisé
Suspicion à toutes les étapes de la procédure d’accès au séjour pour les étrangers gravement malades. Dans un nouveau rapport publié aujourd’hui, le Défenseur des droits pointe l’aggravation des difficultés d’accès à ce droit censé protéger les personnes malades, résidentes en France, qui n’ont pas accès aux soins dans leur pays d’origine. Il souligne la « baisse drastique des avis médicaux favorables » depuis que cette procédure est pilotée par l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii).
Jusqu’en 2016, le droit au séjour pour raisons médicales s’appuyait sur des avis rendus par les médecins des agences régionales de santé. La loi sur l’immigration de 2016 a basculé la procédure sous la tutelle du ministère de l’Intérieur ; désormais les avis médicaux sont rendus par les médecins de l’Ofii. Et ils sont sévères : en 2017, selon les chiffres de l’Ofii, 200 personnes porteuses du VIH ont reçu un avis défavorable au maintien sur le territoire, parmi elles des personnes originaires de pays les plus pauvres du monde.
Ce droit, depuis sa création, fait l’objet d’une suspicion de fraude alimentant la multiplication des obstacles sur le parcours des étrangers malades. Or, note le Défenseur des droits, le préjugé « d’appel d’air » qui pèse sur notre système de santé attirant des étrangers qui chercheraient une meilleure prise en charge est démenti par nombre d’études : « le besoin de soins est une cause d’immigration plutôt marginale ». Les étrangers « découvrent leur pathologie à l’occasion de bilans de santé réalisés bien après cette entrée ». La réalité des chiffres est sans appel : en 2018 sur les 255 550 titres de séjour délivrés après une première demande d’admission, 4 310 l’ont été pour raisons médicales. Moins de 2 %.
Pourtant, « les personnes malades étrangères apparaissent comme des sujets de moindres droits : irrigués par une logique de suspicion, les textes leur consacrent des droits fragiles dont au surplus l’effectivité se trouve parfois entravée par des pratiques illégales », appuie le rapport. Demandes de pièces au guichet des préfectures non prévues par les textes, violations du secret médical, refus de délivrer des récépissés, obligation de présence de la personne malade pour déposer son dossier… Ces constats maintes fois relevés par les associations sont confirmés par le rapport du Défenseur des droits. Il dénonce également le manque de protection effective contre l’éloignement, la prise en charge sanitaire défaillante dans les centres de rétention.
Enfin, le Défenseur fait plusieurs recommandations pour renforcer ce droit et réitère celles faites en 2016 dans un précédent rapport qui n’ont jamais été mises en œuvre.