N° 1290 | Le 2 mars 2021 | Critiques de livres (accès libre)

Ma vérité sur l’autisme

Jean-Luc Robert


Éd. Dunod, 2018 (217 p. – 19 €) | Commander ce livre

Thèmes : Psychanalyse, Autisme

Tir de barrage

Psychologue intervenant au plus près du terrain, Jean-Luc Robert n’hésite pas à mettre en accusation tour à tour les acteurs du monde de l’autisme : ces pédopsychiatres déconnectés et incompétents dont l’évaluation prend toujours trop de temps, laissant les manifestations du syndrome s’installer et rendant toujours plus difficiles les tentatives de le faire régresser ; ces neuropsychiatres qui le réduisent aux seules anomalies du développement du système nerveux central ; ses compères psychanalystes qui s’enferment dans des guerres intestines autour de concepts théoriques hermétiques, improductifs et autosuffisants plus obscurs les uns que les autres ; ces partisans des approches comportementalistes faisant croire que des méthodes éducatives permettraient de dompter cette affection, en révélant les pleines capacités de l’enfant ; ces éducateurs des établissements spécialisés s’épuisant à échapper aux coups de tête, morsures au sang, coups de pied ou de poing, poignées de cheveux arrachés, sans faire mal à leur tour ; mais aussi, ces parents passant de l’espoir à l’hyper-culpabilisation face à des professionnels incapables de guérir leur enfant. Tous sont mis en cause : parce qu’ils nient la réalité d’une pathologie inamovible et inguérissable, parce qu’ils renforcent les comportements pathologiques au lieu de les réduire. Si l’auteur confirme que les sources de cette affection sont multifactorielles, à la fois biologique et psychologiques, il regrette que ces dernières soient dorénavant écartées. Pour lui, l’enfant autiste se heurte à un monde extérieur imprévisible qui peut, à tout moment, déborder son psychisme immature et produire des angoisses corporelles innommables. Pour s’en protéger, il fuit toute séparation et cherche à fusionner avec l’autre, au risque de l’asphyxier, de l’aspirer, de l’assécher. Par ses gestes (auto)agressifs il essaie d’échapper à l’atroce sentiment de néantisation et de discontinuité de son être, d’inexistence et d’incomplétude. Lui donner ce qu’il réclame, alors qu’il trépigne et hurle pour qu’on lui cède, c’est aggraver sa pathologie. C’est justement parce qu’il évolue sur la base du principe de plaisir, qu’il faut l’aider à sortir de la toute-puissance infantile, contrarier son fonctionnement en vase clos et travailler sur l’apprentissage de la frustration et de l’interdit. Sans oublier d’accompagner aussi l’épuisement des adultes qui lui font face.

Jacques Trémintin


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