Les travailleurs pauvres non-salariés, ces inconnus

Il est une catégorie de travailleurs dont on entend très peu parler : il ne s’agit ni des chômeurs ni des bas salaires, mais des non-salariés en situation de pauvreté. Représentant pourtant 27% des travailleurs pauvres, ces personnes restent invisibles aux yeux des pouvoirs publics et des statistiques.
L’Observatoire National de la Pauvreté et de l’Exclusion Sociale (ONPES) a donc décidé de s’intéresser à leur statut, dans une étude statistique et sociologique dirigée par l’économiste Stéphane Rapelli. Cette étude entend « identifier une typologie de ménages », comprendre leur profil et les mécanismes menant à leur invisibilité.

L’approche statistique menée permet d’établir un profil du travailleur non-salarié pauvre. Selon l’INSEE, 461 000 personnes sont concernées : ce sont en grande partie des commerçants et artisans, mais aussi des agriculteurs ou professions libérales. Avec un revenu annuel qui s’élève en moyenne à 8000€, et malgré un faible niveau de vie, la majorité de ces ménages ne sont pas bénéficiaires de minima sociaux. Si les employeurs sont touchés, ce sont essentiellement des indépendants puis les moins de 45 ans, les célibataires et les personnes nées à l’étranger.

L’approche sociologique sur la question de leur invisibilité indique que si ces personnes déplorent un manque d’exposition professionnelle aux yeux de tous et donc un défaut de reconnaissance de leur travail, elles souhaitent en revanche garder secrète leur pauvreté ou leurs difficultés du regard de la société. Les travailleurs non-salariés se sentent également incompris par leurs représentants administratifs et ont un sentiment de mise à l’écart ; ils pensent que leurs actions ne pas suffisamment entendues et valorisées, ce qui participe à leur invisibilité sociale.

Les observations de cette étude appellent donc à la « construction de différents outils permettant de saisir la portée de la pauvreté des non-salariés » ; l’enjeu étant de repérer plus justement la population concernée pour pouvoir prévenir cette pauvreté, agir plus efficacement une fois qu’elle est installée et éviter la spirale de l’invisibilité.

L’étude est téléchargeable dans son ensemble sur le site de l’’ONPES et son résumé est à lire dans « La Lettre n°4 », publiée en mai 2016 par l’Observatoire.