N° 876 | Le 13 mars 2008 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)

Le travail éducatif en milieu ouvert

Laurent Ott


éd. érès, 2007 (256 p. ; 15 €) | Commander ce livre

Thème : Aemo

Les propos développés ici par Laurent Ott sont à la fois originaux et innovants. Le travail en milieu ouvert qu’il présente ne concerne ni les interventions éducatives au sein des familles, ni l’animation séquentielle, pas plus que le travail de rue. Il s’agit d’un concept inédit qui tente de réhabiliter l’espace public non comme un lieu de perdition et de danger potentiel pour l’enfant, mais comme un support d’épanouissement et d’apprentissage de la citoyenneté.

L’auteur commence par un constat : les enfants des villes sont socialement et culturellement parqués dans des lieux réservés. L’entreprise de diabolisation de l’extérieur ne les prépare pas à cultiver en eux les ressources qui leur permettraient de réagir face à l’inconnu. On ne les prépare pas à gérer le risque, mais à avoir peur du danger. Or, ce dont ils ont besoin, ce n’est pas d’être gardés, mais de bénéficier de compagnie, de relations, de communication avec des adultes qui s’inscrivent avec eux dans une relation continue et constante. On en est loin.

Ce qui domine aujourd’hui, c’est la cassure. Des enfants, on n’en parle plus qu’en tant que victimes en puissance ou fauteurs de troubles potentiels. Quant aux adultes, éparpillés dans des institutions éducatives cloisonnées (familles, écoles, centres de loisirs…), ils offrent non la continuité tant recherchée, mais une attention émiettée. Les professionnels qui pratiquent trop souvent une relation distanciée sont parmi les plus menacés par l’usure et le désinvestissement. Ils présentent une peur archaïque d’être dévorés, de s’attacher ou de se mettre au jour, voyant ainsi amputée la part la plus consistante et spécifique de leur métier : « tout se passe comme si la relation éducative était exempte de toute implication personnelle et de toute résonance affective » (p.27).

Laurent Ott préconise de redonner au travail de rue toutes ses lettres de noblesse. Il dessine précisément les contours du travail en milieu ouvert qu’il revendique : mettre à disposition un espace et des intervenants qui permettent aux enfants de construire leur propre activité sociale. Créer un lieu non stigmatisé, destiné à l’ensemble de la population, même si à partir de cet accueil indifférencié, on peut proposer une prise en charge plus individualisée pour les plus en difficulté. Autoriser la libre circulation des enfants qui ne viendraient là que sur la base de leur seule adhésion et de leur unique motivation. Dynamiser des activités pouvant être initiées par le groupe d’enfants lui-même, sans s’interdire d’être soi-même force de proposition. Prévoir qu’elles puissent passer d’un lieu en plein air à une salle couverte et inversement. S’appuyer d’abord sur les enfants, pour ensuite s’ouvrir aux parents et au voisinage. Une telle expérience a existé : la Maison Robinson à Lonjumeau. Elle a disparu, faute de subventions.


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