N° 643 | Le 21 novembre 2002 | Katia Rouff | Critiques de livres (accès libre)

Le métier d’homme

Alexandre Jollien


éd. Seuil, 2002 (90 p. ; 9 €) | Commander ce livre

Thèmes : Physique, Souffrance

« Je suis un anormal. On l’a dit, assez. Je l’ai senti. Les mouvements des yeux qui passent à l’examen chaque parcelle de mon être me l’apprennent : tel regard fixe le mien puis descend, là précisément où se trouve la preuve qu’il recherche : « Il est handicapé ». Parcours des yeux, quête insistante du talon d’Achille, de la faiblesse. Ce que la plupart des gens perçoivent, c’est l’étrangeté des gestes, la lenteur des paroles. La démarche qui dérange. Ce qui se cache derrière, ils le méconnaissent. Spasmes, rictus, pertes d’équilibre, ils se retranchent derrière un jugement net et tranchant, sans appel : voici un débile. Difficile de changer cette première impression, douloureux de s’y voir réduit sans pouvoir s’expliquer », écrit Alexandre Jollien dans son très beau livre « Le métier d’homme »

Né en suisse en 1975, infirme moteur cérébral (IMC) depuis sa naissance, Alexandre Jollien a vécu 17 ans dans des institutions spécialisées puis s’est tourné vers la philosophie. Dans son ouvrage, sobre, court, parfois drôle, il fait l’éloge de l’algodicée (connaissance à travers la souffrance) « d’abord l’espérance exigeante que l’épreuve qui m’accable ne m’anéantira pas. Je me dois de lui opposer une résistance, de poursuivre à tout prix l’exercice de ma liberté, de ne pas me laisser vaincre afin de conserver ma joie comme une arme indispensable ». Il explique comment – non sans difficulté – mais dans « un combat joyeux », son expérience et la philosophie l’aident à cheminer dans « Le métier d’homme ». Auteur d’un très remarqué premier livre, Éloge de la faiblesse (éd. Cerf), il donne aujourd’hui des conférences sur le thème de la différence et de la communication.


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