Démantèlement des camps à Calais : destination inconnue

L’évacuation « humanitaire » de la « jungle » calaisienne devait durer dix jours, mais a été expédiée en trois. Lundi et mardi plus de 3 200 majeurs avaient été transférés dans un des centres d’accueil et d’orientation (CAO) répartis en France. Les exilés ont embarqué dans 45 cars dans la journée, pour beaucoup sans connaitre leur destination. S’ils quittent la boue de leur bidonville, ils ignorent aussi leur risque d’être « dublinés », c’est-à-dire renvoyés dans le pays par lequel ils sont entrés en Europe.
Pour 772 mineurs, l’attente se poursuit dans les containers du centre d’accueil provisoire installé dans le campement de Calais. « Sur 1 290 mineurs recensés, 273 ont rejoint la Grande-Bretagne, ce n’est pas suffisant, déplore Pierre Henry, directeur de France Terre d’Asile. 40 % d’entre eux ont de la famille au Royaume-Uni et peuvent donc prétendre à la procédure de regroupement familial. » Mais les Britanniques rechignent, d’où la création de CAO pour mineurs. Mardi, Médecins sans frontières a quitté le camp pour protester contre le tri des mineurs orientés vers ces centres, pouvant être déclarés majeurs au faciès.

« Chasse aux exilés »

D’après le recensement des associations sur le terrain, la « jungle » comptait 6 500 à 8 000 exilés. Le compte n’y est donc pas, et que vont venir les irréductibles du passage vers l’Angleterre ? « Entre 1 500 et 2 000 personnes ont préféré rester dans le Calaisis pour tenter de rejoindre le Royaume-Uni, décrit Christian Salomé de l’association l’Auberge des migrants. Je crains une chasse aux exilés par les forces de l’ordre après le départ des journalistes. » Selon lui, un millier de places auraient été réservées pour eux dans les centres de rétention administrative du pays.
Majoritairement originaires d’Afghanistan, du Soudan ou d’Erythrée, 80 % des ex-habitants de la jungle devraient pouvoir obtenir le droit d’asile. Reste une inconnue de taille : comment vont-ils être accompagnés dans leurs démarches administratives et dans leur nouvelle vie, dans des CAO décriés pour la faiblesse de leur taux d’encadrement ?