N° 1312 | Le 1er mars 2022 | Critiques de livres (accès libre)

Contre les femmes

Abram de Swaan


Éd. Seuil, 2021, (368 p. – 22 €) | Commander ce livre

Thèmes : Femme, Histoire

Le long chemin de l’émancipation

Trois époques forment les trois parties de ce livre : la domination patriarcale, le mouvement d’émancipation féminine et la réaction masculiniste qui y répond. La description qui initie l’essai est digne du magasin des horreurs. La suprématie masculine rivalise de cruauté à travers le monde : bébés filles supprimés à la naissance quand ce n’est pas l’avortement de leur embryon, après que l’échographie ait identifié leur sexe ; mutilations génitales par excision ; pédophilie officielle autorisant le mariage avec des fillettes ; visages vitriolés en réponse à toute transgression des codes de pudeur et de réserve ; interdiction d’adresser la parole ou de regarder un étranger ; obligation de couvrir une partie du corps ; crimes d’honneur justifiés par l’infidélité de l’épouse ; féminicides présentés comme crimes «  passionnels  ». On ne compte plus les actes de terreur, de force brutale et d’oppression légitimés tant par les préjugés idéologiques d’une prétendue infériorité féminine que par l’artillerie misogyne de toutes les religions existantes. Et pourtant, depuis une cinquantaine d’années, les femmes se sont mises en marche au niveau mondial : régulation des naissances, chute spectaculaire du taux de mortalité pendant et après la grossesse, scolarisation massive y compris à l’université, accession à quasiment tous les emplois, progression de l’égalité des droits… Si cette émancipation est loin d’être achevée, elle se heurte surtout à la riposte de la part de tous ceux qui n’acceptent pas de voir leurs privilèges et leur domination remis en cause. Les fondamentalismes religieux de toutes obédiences, mais aussi les catholiques, évangélistes, musulmans et juifs se revendiquant de la tradition patriarcale ont été rejoints par l’extrême droite réactionnaire et la «  nanosphère  » défendant la virilité menacée des «  vrais hommes  ».

Jacques Trémintin


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