■ ACTU - Exil : viens voir ma maison

Avec Refuge, le photographe Bruno Fert nous plonge dans l’intimité de l’exil avec des photos puissantes rassemblées dans un livre ; exposées à Paris jusqu’au 16 février, puis dans d’autres villes.

« Habiter c’est ce que nous avons tous en commun. Que nous soyons nomades ou sédentaires, nous habitons tous. Les abris temporaires des populations migrantes reflètent leur personnalité, tout comme nos appartements ou nos maisons parlent de nous », explique le photographe Bruno Fert dans son livre (1) – soutenu par Médecins Sans Frontières et l’association Aurore - et son exposition (2), actuellement accrochée aux grilles de l’Hôtel de Ville à Paris. À partir de ce point commun, il souhaite nous amener à nous mettre à la place de l’autre en observant son lieu de vie.

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Le photographe nous livre des images d’intérieur de tentes, de cabanes ou de chambres, associées au portrait de leur(s) habitant(s) et à leur témoignage.
Ali, 18 ans, né au Koweït, apatride, vivait dans une cabane à Calais en 2016. Un poster de Spiderman et des nounours rappellent son âge. Accroché au mur, le tableau d’une maison européenne cossue représente peut-être son rêve. Ali est né dans une famille de bédouins sans droits, même pas celui à la nationalité.
En 2017, Khoke, 50 ans, vivait dans un centre de réfugiés à Hanovre (Allemagne) avec son petit-fils Karam, 6 ans. Ils sont yézidis d’Irak. Les parents et les trois sœurs de l’enfant, bloqués en Grèce, attendaient l’autorisation de l’administration européenne pour pourvoir les rejoindre. Sur la photo, une chambre très simple mais sur le sol, une nappe ronde bleu nuit sur laquelle la grand-mère a déposé des merveilles pour le repas.

« Il faut se souvenir de la manière dont étaient représentés les migrants au plus fort de leur arrivée en Europe à l’été 2015 ainsi qu’au moment où Bruno Fert commence cette série de photographies, en 2016, rappelle Michaël Neuman, directeur d’études au Centre de réflexion sur l’action et les savoirs humanitaires (CRASH). À l’époque, nous croulions sous les images de foules marchant en file indienne ou entassées sur des bateaux ; des masses de gilets de sauvetage orange surmontés de visages noirs se détachant sur une eau bleue. C’étaient des images extrêmement photogéniques et dramatiquement belles. Mais, finalement, elles ne racontaient rien des gens qu’elles représentaient. » Selon lui, les personnes exilées posaient parfois dans un cadre assez archétypique, hyper répétitif et caricatural : celui du sauveteur et du sauvé ; de la main blanche qui sauve le visage noir. « La répétition trop plate de ces clichés était devenue pénible et il était important d’en sortir.  »

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(1) Refuge, Éditions Autrement, 2019. L’ouvrage a décroché le prix de photographie de l’Académie des Beaux-Arts.

(2) À découvrir sur les grilles de l’Hôtel de Ville de Paris jusqu’au 16 février mais aussi au Musée national de l’histoire de l’immigration (dix-huit photos font partie de l’exposition permanente), puis à Sète (Hérault), Bruxelles (Belgique), etc. – Informations sur : http://www.brunofert.com/