N° 654 | Le 20 février 2003 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)

Et si on parlait… de la violence

Jean-Marie Petitclerc


éd. Presses de la Renaissance, 2002 (112 p. ; 9 €) | Commander ce livre

Thème : Violence

Jean-Marie Petitclerc, éducateur et directeur d’un service de prévention, est régulièrement sollicité pour des interventions auprès des jeunes. Ce sont leurs questions et ses propres réponses qui constituent la trame de cet ouvrage. Bien sûr, il faut éviter l’amalgame entre une minorité qui peut parfois faire régner la terreur et une majorité qui aspire à vivre dans une certaine sérénité. Mais, la violence est devenue un sujet trop récurrent, pour qu’on ne tente pas de la traiter avec intelligence. Ce que réussit justement fort bien à faire l’auteur.

Il commence par en définir les limites. Certains jeux et chahuts peuvent en avoir l’apparence extérieure, l’agressivité étant au cœur de la force de vie de l’humanité. La violence, elle, commence dès lors qu’il y a non-respect du « non » de l’autre, de son bien ou de sa différence. On a parfois tendance à la banaliser, en prétendant qu’elle a toujours existé.

Ce qui inquiète, dans les évolutions récentes, c’est bien sûr le passage de 92 912 infractions commises par les mineurs en 1993 à 177 017, en 2001. Mais c’est aussi l’apparition aux côtés d’une délinquance traditionnellement utilitaire (se procurer frauduleusement ce qu’on ne peut obtenir par ses propres moyens) une délinquance violente et gratuite. Mais, ce serait une erreur de se contenter de renvoyer la responsabilité de cette situation aux seuls jeunes. C’est aussi un problème d’adulte et le résultat d’un déficit d’éducation. C’est que la capacité d’établir une relation pacifiée avec l’autre et respectueuse de ce qui le différencie de soi, ne surgit pas ainsi spontanément ou naturellement. C’est tout un cheminement qui permet d’y accéder.

Or, ce qui semble l’emporter aujourd’hui, c’est vouloir affirmer sa personnalité. Ce n’est pas problématique en soi, sauf à vouloir imposer ses désirs envers et contre tout (et tous). Ce qui crée les difficultés, ne relève pas, selon l’auteur, d’une crise d’autorité, mais d’une crise de crédibilité des porteurs de cette autorité. Pour expliquer cette dégradation, on peut évoquer des raisons personnelles (tempérament lié à l’histoire individuelle), mais aussi conjoncturelles (circonstances et contexte de l’acte de violence), sans oublier les aspects environnementaux (la façon dont son groupe de référence réagit à sa transgression). Ces facteurs se combinent.

Mais trop souvent, on oppose ces explications les unes aux autres : ce serait la faute à la société ou la faute de l’individu. En réagissant ainsi, on risque soit de transformer le jeune en bouc émissaire soit de le déresponsabiliser. Dans les deux cas, on ne lui rend pas service. Car que les manifestations de violence soient l’expression d’un mal-être ou d’une provocation, elles justifient toujours une réaction de la part des adultes. Et celle-ci doit articuler la sanction et l’écoute en se fixant pour objectif de donner les moyens aux jeunes d’exprimer ce qu’ils ressentent d’une autre manière.


Dans le même numéro

Critiques de livres

Maryse Vaillant & Christine Laouénant

Les violences du quotidien