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► C’est quoi le problème ? Par Mélodie • Reine de la plage

J’observe une petite fille sur la plage.
Quel âge peut-elle avoir ? Trois ans, guère plus ! Elle ne regarde pas le monde, ne répond pas quand on lui parle. Si des enfants tentent de l’approcher, elle leur tourne le dos et rassemble pelle, seau et râteau entre ses jambes ! Pas question de partager, j’imagine. Son grand frère ‒ qui a à peine deux ans de plus ‒ s’assied à ses côtés et commence à creuser. Elle cicle, se raidit et cherche des yeux ses parents. Il s’éloigne, penaud, abandonnant toute initiative pour esquiver une bataille perdue d’avance et le regard réprobateur de leurs parents. Elle obtient ce qu’elle veut en criant, en pleurant et sans aucun doute le plus souvent sans rien demander, d’ailleurs. Une sorte d’enfant-reine sans toque d’or, de jupe de Damas, de satin ou de velours, pas plus que de brassière en toile d’argent ornementée et surtout hors sujet(s).
À propos de sujet, je pense qu’elle a détrôné son ainé sans tambour ni trompette et qu’elle l’a transformé en serviteur dès qu’elle a fait ses premiers pas. Pauvre gamin qui s’efface pour éviter d’entendre pour la énième fois qu’il est le plus grand et qu’il doit être raisonnable, c’est comme ça ! L’injonction parentale est si forte qu’il s’est mué en triste sire, bien malgré lui. Cette gosse fait sa vie comme elle peut ‒ ignorant que les mots existent pour lier, nommer et mettre du sens sur ses émotions. Elle ne connaît que les cris ‒ les siens ‒ qui déboulent malgré elle, quand une infime frustration se profile.
Tout lui est dû tout de suite et elle pleure, puis boude si ça résiste en face d’elle ! Être des parents suffisamment bons n’est sans doute pas donné à tout le monde. En tout cas, nous sommes tous novices en la matière lorsque l’enfant paraît ; personne n’a la recette posée sur un plateau d’argent. Nous faisons des erreurs et c’est tant mieux pour l’enfant.
Un peu de frustration n’a jamais fait de mal, au contraire. Il y a fort à parier que bien dosée, elle permette à la parole de trouver son chemin et qu’elle ouvre la fenêtre de la pensée. Mais pour l’heure, les deux enfants que je regarde ‒ l’une trop livrée à elle-même et l’autre tyrannisé ‒ sont perdus, abandonnés par des parents dépassés qui ferment les yeux devant les dégâts présents et ceux immanquables à venir.


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