Œil et oreille

« 1 2, 3, soleil ! Tu as perdu, tire-toi. Tu ne joues pas avec nous, c’est clair !   ». Dans la cour de récréation d’une école primaire, Julie, une fillette, un peu moche et bizarre, est rejetée par toute sa classe. Un jour, arrive Émile. «  Je compte sur vous pour l’accueillir  », annonce la maîtresse. Chuchotis des élèves entre eux : «  s’il s’assoit à côté de moi, je déménage  ». Émile, atteint d’un handicap neuro-adaptatif, s’installe, au fond de la salle, à côté de Julie. Une relation d’amitié pourrait-elle se (...)

« Prenez une profonde inspiration. Soufflez et suivez ma voix.  » Sur des rideaux blancs, des images projetées nous embarquent en Alabama aux États-Unis. Apparaissant et disparaissant derrière ces tissus, l’écrivaine Tania de Montaigne (1) raconte un pan essentiel de la culture noire. Dans cette région du Sud-américain, les lois ségrégationnistes sévissent encore dans les années cinquante. Prudence et déférence sont de règle. «  Tête et yeux baissés, ne pas fixer, ne pas répondre.  » Mais que se passe-t-il (...)

« Elle est incroyable cette salle, elle te respecte  », dit un usager de la salle de consommation à moindre risque (SCMR), installée à Paris près de la Gare du Nord. Une première en France, résultat d’une longue bataille pour faire accepter cet outil de la réduction des risques en France. Cécile Dumas vit en voisine. Elle s’interroge sur ce lieu, rencontre les professionnels de l’association Gaïa qui portent le projet et décide de faire un film : Ici je vais pas mourir. «  C’était soudain comme un pont (...)

« Que faire quand on devient témoin d’une politique hostile aux étrangers ?  », questionne Hind Meddeb en préambule de son film, Paris – Stalingrad. Prendre la caméra pour laisser une trace. En 2016, sur les trottoirs du quartier de Stalingrad à Paris, des hommes et des femmes venus du Soudan, d’Éthiopie, de Guinée, d’Afghanistan, survivent entre campements de fortune, expulsions régulières, destructions systématiques de leur fragile abri de toile, pressions policières et attente d’un rendez-vous en (...)

« Être adoptée fait partie de mon identité !  » Amandine Gay répondait ainsi à une femme qui, lors d’un débat, lui lançait : «  mais enfin l’adoption n’est pas une identité !   ». La jeune femme, née sous X au début des années quatre-vingt, le revendique : la question de l’adoption est politique. Son nouveau documentaire, Une histoire à soi, le prouve en retraçant le parcours de cinq personnes arrivées bébés en France via l’adoption internationale. Il interroge les questions d’inégalités Nord/Sud, de classes, (...)

Toujours à l’arrêt, le monde culturel se réinvente, contre vents et marées, pour perdurer et dire combien il est essentiel à la vie. «  Quand en sortirons-nous ? Nul ne peut répondre, constate Wajdi Mouawad, auteur, metteur en scène et directeur de La Colline, théâtre national (Paris). Notre capacité, ici, consiste à être dans le récit, dans les histoires, dans le conte, dans la parole, de ce que parler veut dire.  » Au premier confinement, La Colline lançait #Au creux de l’oreille, une aventure (...)

Après les ex-détenus d’Une longue peine (LS n° 1214) et les personnes transgenres de Trans (més enllà) (LS n° 1244), le metteur en scène Didier Ruiz clôt un triptyque qui met en lumière des invisibles de nos sociétés avec Que faut-il dire aux Hommes ? Cinq hommes, deux femmes, – chrétien.e.s, bouddhiste, juif, musulman et chamane – s’expriment sur leur foi, leur spiritualité, des thèmes dont «  il est peu question dans l’espace public  », précise le metteur en scène. Comme pour ses précédentes créations, il (...)

« Pour une fois, nos images sur nous-mêmes. Nos souvenirs par nos voix.   » Ainsi débute Fils de Garches, un film de Rémi Gendarme-Cerquetti. L’auteur réalisateur, en situation de handicap, a fréquenté enfant l’hôpital Raymond-Poincaré de Garches (92), un établissement spécialisé dans la prise en charge d’adultes et d’enfants souffrant de handicaps lourds. À 34 ans, après plusieurs court-métrages, il réalise son premier long métrage documentaire. Il rencontre d’anciens enfants qui ont côtoyé, comme lui dans les (...)

« La Terre des hommes est un film de corps. Le corps des femmes, le corps des hommes, le corps des bêtes   », avance Naël Marandin, le réalisateur qui évoque une «  fascination pour le langage des corps   ». Dans ce deuxième long métrage, il poursuit un sujet qui lui tient à cœur : filmer des femmes qui se battent dans un monde d’hommes. Dans son premier long métrage, La Marcheuse, il se penchait sur la vie d’une femme prostituée chinoise arpentant les trottoirs parisiens. Dans La Terre des hommes, il (...)

Regarder autrement la banlieue. Dans son documentaire-fiction J’ai aimé vivre là, Régis Sauder transforme Cergy-Pontoise en ville solaire. Il magnifie cette ville nouvelle de la banlieue parisienne en nous faisant rencontrer ses habitants, en nous livrant leur récit de vie. D’abord, celui d’une habitante particulière : Annie Ernaux dont les livres, notamment Journal du dehors et La vie extérieure, deviennent fils conducteurs du film. Les écrits et le film se croisent, racontent par petites touches le (...)

« Une sensation de liberté, une échappatoire, c’est ce que je ressens quand je fais du vélo. J’oublie tout.   » Pour Inès Bigonnet, le cyclisme est «  une bouée de sauvetage  ». Un jour en pédalant, la lycéenne de 16 ans a un déclic : raconter les humiliations qu’elle a subies à l’école et aussi sa passion pour le VTT. «  Pourquoi est-ce que les filles n’auraient pas le droit de faire ce sport ?   » Atteinte du syndrome d’Asperger, l’adolescente s’est donc lancée dans un projet fou : réaliser un film pour apporter (...)

LSD, la série documentaire sur France Culture, documente en quatre épisodes, des expériences de vie, de culture, de savoir. La journaliste Pauline Maucort s’intéresse aux traces que laisse la guerre sur ceux qui la font. Sa série Grandir avec la guerre explore la guerre vécue par des enfants. Liban, Iran, Algérie, Seconde Guerre mondiale, ils ont vécu leur enfance pendant la guerre. Cachés, sauvés, perdus, soldats combattants, ils se sont construits avec elle. Acteurs et victimes malmenés par les (...)