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► LE BILLET de Ludwig • Fatigué de ne rien faire !

Et si on était fatigué à ne rien faire ? Victime d’épuisement professionnel faute de tâche de travail à réaliser ? Impossible me direz-vous. Pas dans nos métiers où la fatigue professionnelle explose, où le nombre de burn-out dû à la surcharge de travail, est exponentiel. Et pourquoi pas ? Pourquoi ne pas se retrouver au placard, isolé dans une aile du service, là, au fond d’un couloir blafard, dans ce réduit sans vu qui sert de bureau. Sans tâche à accomplir. Le comble pour nos métiers de l’humain.
Je vous ai déjà parlé du burn-out et du brown-out, et bien voici le bore-out ! Le bore-out ? Oui, le « travail sans travail », l’inverse du burn-out. Le bore-out est une pathologie engendrée par l’ennui au travail et pouvant conduire à des troubles mentaux graves tels que la dépression ou le suicide ! Il est également appelé "syndrome d’épuisement professionnel par l’ennui" : fait de ne pas s’épanouir au travail. Il s’agit de la situation où le travail que l’on exerce nous ennui.
La mise au placard n’est pas la seule cause. Ce n’est pas ce que j’ai vécu. Non, moi je me suis retrouvé non stimulé, en manque de challenge, dans une routine, un travail rendu inintéressant. Peut-être surqualifié pour mon poste, je vivais mal mes journées. Frustré d’être sous-évalué, inutile, sur un poste isolé du collectif de travail, je me fatiguais. Désintérêt et ennui pour mon travail, j’y ai perdu le sens.
Le bore-out n’est pas sans effets délétères chez les salariés. Sentiments de démotivation, d’ennui, d’anxiété, d’isolement, de culpabilité et de tristesse surgissent, non seulement dans le cadre professionnel, mais peuvent ensuite déborder sur la sphère privée. Et voir s’installer un sentiment d’insatisfaction et de frustration permanent ou bien encore une perte d’estime de soi. Comme toute maladie professionnelle, la sphère intime est touchée, entrainant des conséquences en cascade. Le bore-out n’est pas plus anodin. Il peut conduire à la dépression, au suicide. Oui.
Un collègue semble s’ennuyer ? Parlez lui, intéressez-vous à lui. Il faut en parler. Que ce soit à des membres de sa famille, à des amis ou à un professionnel de la médecine. Certes, il n’existe pas forcément de solution miracle pour sortir d’une situation de bore-out, mais la meilleure chose à faire est de diagnostiquer et comprendre les causes du mal afin de pouvoir réagir au mieux. Si vous êtes en confiance, en parler à son responsable direct pour trouver une solution. Si cela ne mène à rien, savoir aussi se poser les bonnes questions : votre bore-out est-il lié à votre institution ou à votre secteur d’activité ? Si c’est la première raison qui en est la cause, et si toute solution d’amélioration a échouée, est-il possible d’envisagez de démissionner ? Ce qui est j’en conviens une solution difficile tant nous tenons à nos métiers et à l’engagement que l’on y met. Mais qui peut être salutaire, croyez-moi. Passer le deuil, viens la reconstruction. La médecine du travail peut vous y aider. Les instances du personnel aussi. On ne doit pas se rendre malade du travail.
Comme le montre souvent l’excellent Vincent Lindon au cinéma, lui qui est si prompt à parler du monde du travail, sachons reconnaitre nos signes de fatigue. Sachons en parler également, pour ne pas que la souffrance demeure clandestine.