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► LE BILLET de Ludwig • Faites équipe, qu’ils disaient !

Ah l’équipe ! Cette belle association de disciplines et de compétences en vue de réaliser un objectif commun, accompagner avec le plus d’efficience possible…Que ça a l’air chouette ! Sauf quand les dysfonctionnements institutionnels s’en mêlent. Ça arrive. Pus souvent que l’on ne l’imagine. Faites équipe, faites équipe, qu’ils disaient, sur fond d’injonctions paradoxales d’autonomie d’organisation. Perdus, on nous ordonnait cette injonction comme une ritournelle sans personne pour nous guider dans notre quête. Comment « faire équipe », quand surgissent les difficultés et qu’il est si facile de lui tirer dessus à boulet rouge, sans remise en question de l’organisation ou de la direction ?
Une équipe éducative est donc un groupe de travail composé dans l’intérêt du public, nécessitant une bonne communication, de la supervision, des rôles, des fonctions et des statuts respectés. De la cohérence et de la congruence aussi. Facile à dire. Cela devient de plus en plus un idéal à atteindre, tant les équipes, dans certains secteurs, sont déstructurées. Les turn over, les absences, le manque de formations sont autant d’éléments qui fragilisent non seulement les équipes, mais surtout les prises en charges. Et puis chacun à un rôle à y jouer, comme le soulève E. Enriquez (1). On trouvera ainsi, selon, le formateur, le thérapeute, le militant, le réparateur, le transgresseur, le destructeur. Celui qui pense et formalise, apporte de la connaissance. Celui qui soigne et arrondit les angles, celui qui revendique, ou celui dont la fonction -par sa personnalité- est d’être mortifère au sein du groupe. Je vous vois, à la lecture de ces lignes, vous poser bien des questions sur votre place….
Ce n’est pas tout, oh non. D’autres comportements contre-productifs sont observés. Le parasitisme, qui consiste à faire faire le travail par ses collègues. L’agression interpersonnelle entre membres de l’équipe. La survalorisation personnelle de celui qui considère ses propres contributions comme supérieures aux autres. Ou encore l’individualisme par le manque d’engagement dans le collectif, le manque de sens partagé. Je passe sur les phénomènes observés comme le combat-fuite, l’illusion groupale, la communication pathogène, ou le leadership, pour ne pas épargner, désolé, la fonction du cadre hiérarchique. Pour moi, l’encadrement, dans un système pyramidal, reste un rouage important, avec des missions d’animation et de direction de l’équipe, « d’emmener » son équipe vers la victoire. Sa proximité, sa manière d’animer, sa posture, son comportement, son mode de leadership influent sur l’action de l’équipe et de son travail. Cette fonction de facilitateur et de régulateur du travail collectif passe aussi par la valorisation, qui participe à la reconnaissance du travail réalisé. Il se doit de se remettre en question et de se demander si son équipe « va bien ». Le cadre est le capitaine du navire et doit d’être à la barre pour ne pas que le bateau tourne en rond. Donc, il est aussi responsable quand les choses tournent mal. Ainsi que tous les autres échelons hiérarchiques. Vous la voyez venir la théorie du couplage des évènements ?
Alors, bien sûr, il est facile de donner des leçons. Mais avoir certains éléments d’analyse permet d’y voir un peu plus clair et de se positionner.
Et bien sûr qu’aujourd’hui, avec le tournant managérial, il doit être bien difficile… de « faire équipe ».


(1) Kaës R., Fustier P., Enriquez E., Roussillon R., et al, L’institution et les institutions, Études psychanalytiques, Dunod, 2012