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► LE BILLET de Ludwig • Comme un (trop) long dimanche

Le temps aurait dû être au beau fixe pour un début Juillet et présager ainsi d’une belle journée, ensoleillée.
Mais voilà, il pleut. Il fait bien frais pour la saison et le service reprend. C’est dimanche. C’est tristesse, c’est gris et déprimant. Et les jeunes t’attendent alors que tu as laissé les tiens au chaud. Mais je suis éducateur en foyer, et c’est mon boulot. Il est 8 heures et c’est le début d’un long dimanche, non pas de fiançailles, mais de travail. Au cas où, j’ai glissé le disque dur chargé de films dans ma besace histoire de s’occuper, sait-on jamais…
Ils sont donc deux aujourd’hui à tenir les murs de la structure, sans DVH (droit de visite et d’hébergement), mais se disent contents. Aujourd’hui, ils ont le groupe pour eux, le calme, l’ordinateur et la télé à ne pas partager. Rien que pour eux. Aller, café et lecture du cahier de liaison, prendre connaissances des dernières nouvelles, voir quel est le programme de la journée. Pas motivé. Après tout, se doit-on d’être toujours speedé, dans l’activisme forcé ? Car eux ont l’air bien calme et décidés à en profiter tranquillement.
Aujourd’hui, on ne fait rien, et cela fait aussi du bien. Rien ? N’est-ce pas déjà faire quelque chose que de ne rien faire ? Parce que oui, cette journée va me paraître interminable mais qu’importe. Qu’importe que le vent m’emporte, que l’on ne soit pas tout le temps dans le remplissage, voir l’hôtellerie, la compensation des manques, car les dimanches ne riment pas forcément avec activités. Nous vivons dans une société qui nous pousse constamment à faire quelque chose de productif : bon, je connais bien des éducs qui trouveraient toujours et encore des heures à remplir, des occupations « éducatives ». Ça rassure, aussi. Mais Je pense que les mômes ont le droit, après leur semaine, comme tout adulte que nous sommes, au repos, à la détente, au farniente, au rythme lent. Et puis, on ne fait pas des activités tous les week-ends dans toutes les familles non plus. C’est facile à dire en ce jour gris. Je n’écrirais sans doute pas la même prose si le soleil m’avait fait risette. Non, je serais peut-être en montagne à crapahuter ! Et vous ne me liriez pas.
Donc rien…Parce qu’avoir du temps libre est essentiel pour notre bien-être mental et physique. Pour s’ennuyer, réfléchir, conscientiser. Lorsqu’on ne fait rien, le cerveau, lui, ne fait pas rien ! Au contraire, il stocke, il assimile. Oui, ne rien faire, mais « faire » des pauses, est nécessaire pour recharger ses batteries, aider à faire face à un problème, trouver des solutions et être plus créatif. Vive l’ennui pourrait-on dire !
Aujourd’hui donc, on ne fait rien. Enfin si, le quotidien simple d’un repas, d’un DVD, d’être là, juste présent. Sans culpabilité aucune. Et puis leur lâcher la grappe un peu et les laisser errer dans leur imaginaire. Ce n’est pas inintéressant pour un enfant de ne pas répondre sans cesse à des sollicitations.
Tiens, je me suis endormi devant le film. Il m’en a fait la remarque. Et alors, l’éducateur n’est-il pas un homme (ou une femme) comme un autre ? Et c’est peut-être, dans ce « vivre avec », montrer ce que l’on est en ce jour pour tant d’autres chômé.
Et l’après-midi à défilée, la pluie battant les vitres, passant l’heure du goûter et puis vint tranquillement le temps du dîner.
« Eh, on fait un Uno ? » « Aller d’accord, un Uno et au lit ! »