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■ ACTU - Un manifeste pour l’inclusion financière universelle

Pas rentables, trop à risque, de nombreuses personnes se heurtent encore aux refus des banques de leur ouvrir un compte. D’autres éprouvent des difficultés à obtenir de l’argent liquide, faute d’adaptation des distributeurs et des agences aux handicaps. Avec des fins de mois qui commencent le dix, les ménages en situation de précarité s’endettent et enrichissent les banques à coup de frais d’incidents bancaires : 6,7 milliards en 2018 d’après UFC-Que Choisir. Face à ces situations, le Secours Catholique, Emmaüs, l’Association France handicap, UFC Que Choisir, avec Familles rurales et la Confédération Syndicale des familles dressent un nouvel état des lieux de la situation de l’inclusion financière en France. Onze ans après la sortie du « Manifeste pour l’inclusion bancaire des populations fragiles », ce groupe de travail inter-associatif sort le « Manifeste pour l’inclusion financière universelle. »



La France compte de moins en moins de distributeurs automatiques de billets, or l’accès à l’argent liquide permet de réaliser des économies. ©Myriam Léon

« L’inclusion financière englobe l’accès à un compte et aux moyens de paiements, explique Geneviève Colas du Secours catholique. Sans l’un et l’autre, de nombreux droits sont bafoués. Il est difficile de vivre sans ces services bancaires nécessaires pour trouver un emploi, pour percevoir un salaire, des allocations, des remboursements de santé, s’abonner à un service téléphonique, régler des factures… » À la fois recueil d’expériences, guide du droit des usagers, plaidoyer et porteur de préconisations, ce livret montre qu’en la matière de nombreux progrès restent à faire pour les personnes les plus vulnérables.

Droit au compte = droit fondamental

Parfois en toute illégalité, les pratiques bancaires stigmatisent des publics déjà confrontés à des difficultés : mineurs non accompagnés, jeunes accueillis à l’aide sociale à l’enfance, personnes sans domicile, aux revenus jugés trop faibles ou entièrement dépendantes des prestations sociales, étrangers sans titre de séjour ou d’une durée d’un an ou moins. Ce droit fondamental est pourtant inscrit dans la loi. En cas de refus, une procédure de droit au compte permet de saisir la Banque de France. Elle désigne alors un organisme bancaire placé dans l’obligation d’accepter l’ouverture sans condition de revenu, même en cas d’interdit bancaire. En pratique, associations et travailleurs sociaux se heurtent encore à des refus. Chaque année, un quart des procédures de droit au compte bancaire n’aboutit pas à une ouverture (1).

Stigmatisation hors la loi

Dans ces circonstances que peut un manifeste ? « Nous travaillons sur ce sujet avec une dizaine d’associations et à partir des difficultés qui remontent de nos réseaux respectifs, détaille la responsable de l’inclusion financière au Secours Catholique. En même temps nous participons aux réunions organisées par la Banque de France, notamment à celles de l’Observatoire de l’inclusion bancaire (OIB) et du Comité consultatif du secteur financier (CCSF). Le manifeste a été rédigé au cours de l’année à partir de l’expérience des personnes concernées et déjà certaines pratiques évoluent. Par exemple, en septembre la banque LCL et la Société générale ont baissé la tarification de leur offre Clients fragiles à 1 euro par mois. Nous travaillons en étroite collaboration avec la Banque de France qui a les moyens de faire infléchir les pratiques des autres banques. » Il faudra qu’elle en use pour aboutir à un service bancaire universel, intégré, ouvert sans conditions de ressources et gratuit.

Myriam Léon
1 : rapport de la Cour des comptes 2021
Manifeste pour l’inclusion financière universelle


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