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■ ACTU - Mal de vivre dans la petite enfance

En pleine crise du recrutement et sous le choc du drame survenu dans une crèche à Lyon, les établissements d’accueil du jeune enfant et de soutien à la parentalité sont sommés de s’adapter à un nouveau cadre réglementaire qui entre en vigueur dès septembre prochain. Problème : les textes qui encadrent cette réforme ne sont toujours pas publiés.

La pénurie de personnel dans le secteur de l’accueil du jeune enfant est facteur de mise en danger et de maltraitance des tout petits. Peu évoqué malgré les alertes de spécialistes, professionnelles et familles, le sujet s’impose dans tous les médias depuis la mort d’un bébé de 11 mois dans une crèche lyonnaise, le 22 juin. Seule dans les locaux, l’auxiliaire puéricultrice a reconnu l’avoir empoisonnée pour qu’elle cesse de pleurer.



Le taux d’encadrement est un facteur essentiel du bien-être et de l’éveil des tout petits. ©Myriam Léon

L’employée a été mise en examen pour homicide volontaire et la crèche privée, People & baby, fermée pour trois mois renouvelable. L’arrêté préfectoral stipule qu’ « une enquête administrative sera diligentée par la métropole de Lyon afin de vérifier que les conditions de fonctionnement de l’établissement sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires et garantissent le respect de la santé, physique ou mentale ou l’éducation des enfants accueillis ».

Recruter des non diplômées

Justement, le gouvernement tient à voir appliquer un nouveau cadre réglementaire de l’accueil de la petite enfance dès le mois de septembre. Au vu de ce drame et de des témoignages recueillis par le groupement de représentantes syndicales, professionnelles et familiales « Pas de bébé à la consigne » sur son site #Petiteenfanceenpéril, il semble en effet urgent d’améliorer l’accueil dans les crèches. Sauf que la réforme de simplification des normes (NORMA) laisse craindre un affaiblissement de la qualité d’accueil des enfants et une dégradation des conditions de travail pour les professionnels à leurs côtés. « Les crèches lucratives font pression depuis des années pour que leurs pratiques deviennent la norme », s’inquiète une représentante de Pas de bébé à la consigne.

Une professionnelle décrit sur #Petiteenfanceenpéril une exercice en mode dégradé et craint une aggravation liée à cette réforme : « Le travail s’effectue à la chaîne, les anciens pédagogues qui ont fait un travail formidable sont aujourd’hui bafoués, leur pédagogie est nommée dans le projet pédagogique mais aucunement utilisée par faute de moyens. Et pour contrer le manque d’effectif du personnel, l’État préconise d’embaucher du personnel non diplômé ! Ce n’est pas une solution à un problème, ce n’est qu’un problème qui se rajoute aux autres ».

Quel taux d’encadrement ?

D’autre part, l’Uniopss (union nationale des associations de développement des solidarités) souligne que « la publication de plusieurs décrets et arrêtés tarde ». Or ces textes portent notamment sur les taux d’encadrement et l’analyse de la pratique. Actuellement, la France juge suffisant d’avoir une adulte pour cinq enfants non marcheur, un pour huit marcheurs et un pour six quelque soit l’âge… « Deux professionnelles pour dix enfants âgés entre 5 mois et 1 an, imaginez ne serait-ce qu’un instant dix bébés qui pleurent en même temps et ce pendant plusieurs heures car ils ont faim mais que nous sommes que deux pour répondre à leurs besoins », témoigne sur le même site Marie qui, après avoir gagner le smic pendant plusieurs années dans une micro crèche, a fini en burn out.

Alertée par ses adhérents qui ne parviennent pas à sensibiliser le gouvernement à l’aggravation de la crise en lien avec la mise en œuvre de NORMA, l’Uniopss demande un report de « la mise en conformité avec la réglementation attendue pour septembre 2022 de la part des établissements d’accueil du jeune enfant et de soutien à la parentalité est irréalisable. Sur le terrain, ceux-ci devront pourtant rapidement faire face aux injonctions des PMI et des partenaires financeurs (CAF et collectivités locales), notamment pour le versement ». Un dossier chaud pour un nouveau Ministre des Solidarités féru de "social business".

Myriam Léon

Lire plus de témoignages sur le site de Pas de bébé à la consigne