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■ ACTU - Documentaire : La protection de l’enfance vue d’M6

Réactions en chaîne après la diffusion d’un nouveau documentaire sur la protection de l’enfance dimanche dernier sur M6.

Ces dernières années, il ne se passe pas un mois sans que dans un département ou un autre, les professionnels de la protection de l’enfance alertent. En novembre dernier, dans le Loiret, ils écrivaient une lettre ouverte au conseil départemental où ils disaient ne pas vouloir « maltraiter l’enfance maltraité ».
Dans les Hauts-de-Seine, les éducateurs mobilisés dénoncent : « Les jeunes mineurs à l’hôtel sans suivi éducatif quotidien, cela n’est pas de la protection de l’enfance ».
Des alertes répétées dans un silence assourdissant.

Il aura fallu un nouveau documentaire à scandale sur M6 ce dimanche soir dans l’émission Zone interdite pour faire réagir. Dès les premières minutes le ton est lancé : « Notre enquête révèle une réalité stupéfiante » sous un titre du même tenant : « mineurs en danger : les scandaleuses défaillances de l’aide sociale à l’enfance ». Violence, prostitution, délaissement, détournement de fonds, viols… le noir tableau est contrebalancé par un seul foyer présenté comme parfait, une exception.

Chercher la cause

En creux, le documentaire montre les difficultés de recrutement et le remplacement des éducateurs par des « faisant fonction », la surpopulation des foyers, les professionnels dépassés, l’absence de places adaptées pour des enfants avec des troubles psychiatriques… mais sans en interroger la cause.
Parmi les nombreuses réactions des professionnels, Ludwig Maquet, éducateur spécialisé, réagit sur son blog : « Il n’y a pas de raisons que le travail social échappe au rouleau compresseur néolibéral ». Comme pour les hôpitaux, les Ephad, la psychiatrie… « Toute l’action sociale est concernée par ce « new management », par l’idéologie gestionnaire de rentabilité économique capitaliste » Plus loin, il ajoute : « Il est plus rentable d’embaucher au moindre coût, ou, lorsque l’on a plus le choix, d’embaucher le tout-venant parce qu’il faut bien assurer la continuité de service. Sur le dos des populations accueillies. Oui, le travail social est à l’os. C’est d’un plan Marshall du social dont nous avons besoin ».

Pouvoir des images

Un an auparavant, le documentaire « Enfants placés : les sacrifiés de la République » dans l’émission « Pièces à conviction » avait entrainé la nomination d’Adrien Taquet, secrétaire d’Etat chargé de la protection de l’Enfance. Il a été un des premiers à réagir au documentaire de M6 déclarant « son émotion » face aux images et promet une « action volontariste pour mettre fin à des situations qui gâchent des vies et ternissent l’image de toute une profession ». Il assure s’être déjà entretenu avec les six présidents de départementaux concernés par le reportage pour leurs demander de faire la lumière sur les dysfonctionnements constatés. Il veut revoir les procédures de signalements et le plan de contrôle des établissements dans tous les départements et exige une synthèse des résultats dans les trois mois. A croire qu’une image choc a plus de pouvoir que des dizaines d’alertes de professionnels.

Volonté politique

« Les maltraitances évoquées et dénoncées par ce reportage sont la négation même du travail social », réagit à son tour l’organisation nationale des éducateurs spécialisés qui regrette que son alerte en 2012 sur « le recours massif » aux « faisant fonction » sans qualification dans les structures n’ait pas été entendue. Elle appelle à un « pilotage national renforcé ». Dans un communiqué commun, la CNAPE, les Apprentis d’Auteuil, le GEPSO, Nexem, SOS village d’enfants, l’Uniopss « partagent la même indignation face à de telles violences et l’exigence d’y remédier au plus vite » tout en regrettant qu’un seul exemple de bon fonctionnement ait été montré en contrepoint « laissant penser, à tort, qu’il s’agit d’une exception ». Ils appellent à une politique publique ambitieuse « avec de réels moyens d’action » rappelant au passage que le financement de la stratégie de prévention et protection de l’Enfance présentée par Adrien Taquet en novembre dernier reste à définir.