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■ ACTU - Centre social • Grève contre la violence

Jeudi 23 septembre, les grilles sont restées fermées au centre local de la direction de la solidarité départementale de Saint-Girons dans l’Ariège. L’appel à la grève dans ce lieu d’accueil dédié à l’aide sociale à l’enfance et à l’insertion fait suite à une crise débutée le 5 août. Ce jour-là, un usager a une fois de plus insulté et menacé de mort l’agent d’accueil. Sorti par un bénéficiaire qui venait pour un entretien, il revient le lendemain, cette fois armé d’un cric. Dans un communiqué, les salariés estiment que seule « la vigilance et la réactivité de l’équipe ont permis de stopper l’agresseur qui s’apprêtait à entrer dans les locaux ». L’altercation a donc eu lieu au travers de la porte fermée in extremis par l’agent d’accueil.
Suite à cet incident violent, le personnel décide de marquer le coup en fermant le local. Les accompagnements se poursuivent par téléphone, en visite à domicile et en organisant des permanences dans d’autres lieux. Pour reprendre leur travail dans de bonnes conditions, l’équipe demande l’installation d’une porte sécurisée avec un interphone muni d’une vidéo. En attendant, elle réclame qu’un agent de sécurité du département garantisse le maintien de l’activité dans un climat plus serein.

Agent de sécurité temporaire

« Notre employeur nous a indiqué que des travaux seraient réalisés ultérieurement (ndlr : livraison fin octobre) et a refusé l’embauche temporaire d’un agent de sécurité », explique le communiqué. L’accueil physique restera fermé cinq semaines du 9 août au 15 septembre. La veille de la réouverture, le directeur général des services est venu à la rencontre de l’équipe pour relayer la parole de la présidente du conseil départemental. « Pour nous, cela a été la double peine, raconte une assistante du service social souhaitant rester anonyme. Nous attendions du soutien, de l’empathie et la mise en place effective des mesures de protection. Nous avons eu des remarques sexistes, les hommes n’auraient pas eu besoin de vigile (ndlr : sur une trentaine de salariées il n’y a que trois hommes) et des menaces. La violence de cette réponse de l’institution nous parait totalement défaillante. » De son côté, la direction argue qu’elle ne veut pas « bunkériser ses services sociaux ».

Pour garantir la sécurité de l’agent d’accueil, l’équipe très soudée réorganise son fonctionnement afin qu’il reste toujours aux moins deux salariés dans le hall d’accueil. Dans ces conditions, les assistantes du service social ne peuvent plus exercer leur mission quand elles sont de « garde » dans un bureau ouvert. Cinq jours après la réouverture, l’usager agressif fait son retour. « Notre employeur lui a envoyé un courrier pour lui dire qu’il lui était interdit d’accéder au centre local, mais cette personne en fragilité psychologique ne respecte pas le cadre même quand il est posé, regrette une autre assistante du service social. Cela fait dix ans qu’il est suivi, depuis plusieurs années son état se dégrade et on craint un passage à l’acte. Et puis, il n’est pas le seul à se montrer violent. »

Une assistante sociale abattue

Face à une direction qui relativise et minimise cette menace, l’ensemble des salariés à cesser le travail jeudi matin pour manifester dans les rues de Saint-Girons, rejoints par d’autres collègues des services sociaux du département. Le travail a repris mais le préavis de grève court jusqu’à début octobre pour, si nécessaire, pouvoir débrayer sans attendre. En 2010 dans cette commune d’environ 6000 habitants, une assistante sociale de 32 ans, Karima Mezouar avait été abattue d’un coup de fusil par un retraité qu’elle avait rencontré dans le cadre de ses fonctions. Ravivée par les récents événements, la mémoire de ce drame plane sur l’équipe. Traumatisés, trois membres sont en arrêt maladie depuis cette agression du mois d’août.

Myriam Léon