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■ ACTU - Aides à domicile • Leur force invisible

Le collectif appelle à afficher ce logo sur les voitures. (c) DR

« Pour vivre de notre travail, pas survivre. Soyons unis, soyons solidaires, soyons visibles. » Depuis le 6 juin, les professionnelles du maintien à domicile (97% de femmes) mènent l’action « ensemble devenons visibles ». Ce mouvement est orchestré par le collectif national La force invisible des aides à domiciles. « Je l’ai créé lors du premier confinement parce que je me sentais bien seule, explique Anne Lauseig assistante de vie depuis cinq ans, à l’origine de la page Facebook du collectif. Là, j’ai vu que je n’étais pas seule. » La page compte désormais 4500 abonnées, les témoignages affluent de toute la France et se ressemblent : temps partiels imposés payés au smic, surcharges des plannings, heures supplémentaires non rémunérées, frais kilométriques trop peu ou pas remboursés, trajets décomptés du temps de travail, amplitude horaire de 12 heures et plus…. Pour mieux porter ses paroles et revendiquer une meilleure reconnaissance, le collectif a fini par se constituer en association.

Tour de France

Pendant leurs congés, les leadeuses du mouvement sillonnent la France et rencontrent à chaque étape quelques-unes de leurs 450 000 collègues afin d’organiser la résistance et d’établir une stratégie commune. Pour l’instant la lutte consiste à sortir de l’invisibilité en affichant logo du collectif et revendications sur les véhicules. Une action symbolique dont l’aboutissement serait de lancer une journée de grève dès que la mobilisation sera suffisante. « Même si nous ne sommes que 400, l’arrêt de nos interventions essentielles dans le maintien à domicile peut déstabiliser tout le système et engorger les urgences, assure l’assistante de vie girondine. Nous aimerions que le Samu qui se retrouvera alors en première ligne rejoigne notre combat. »

Sept conventions collectives

L’aide à domicile regroupe des salariées de la fonction public territoriale, du secteur associatif, du privé lucratif et des vacataires payées en CESU (chèque emploi service). « Même si nous faisons le même métier, nous dépendons actuellement de sept conventions différentes, c’est donc difficile de se fédérer même si nous partageons les mêmes difficultés, regrette Anne Lauseig. Nos syndicats sont, eux aussi, divisés en fonction des formes juridiques. » A force d’être morcelé, ce secteur met ses salariés en morceaux. Avec la surcharge de travail liée à la pandémie, employeurs et employées partagent l’appréhension d’une vague d’arrêts maladie et de démissions alors qu’il faudrait recruter pour répondre aux besoins.

Premières de corvée

Porteuses de propositions pour une revalorisation de la profession, les « premières de corvées » demandent à être reçues par Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l’Autonomie. Depuis le mois d’octobre, le collectif fait circuler une pétition pour interpeler le gouvernement. Il y expose des axes d’amélioration : obtention du statut de soignantes, revalorisation des salaires, paiement des frais kilométriques, mise en place d’une convention collective unique pour la branche, formation obligatoire au premier secours et gestes et postures (le métier est le plus touché par les accidents du travail), des temps de supervision… A la veille des élections départementales, La force invisible rappelle aussi les responsabilités des territoires dans le manque d’attractivité de l’aide à domicile. « C’est pourtant un métier très enrichissant humainement et culturellement parce que les personnes âgées ou en situation de handicap ont beaucoup à nous apprendre, affirme la militante. Chaque personne que nous accompagnons est différente, il n’y a aucune routine. » Reste à conserver l’énergie de l’apprécier.

Myriam Léon