N° 807 | Le 7 septembre 2006 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)

La peur de la séparation. De l’enfance à l’âge adulte

Daniel Bailly


éd. Odile Jacob, 2005 (218 p. ; 22 €) | Commander ce livre

Thème : Relation

Après sa naissance, le bébé ne se limite pas à une simple demande de nourriture. Sa quête va bien au-delà, tentant de structurer une relation protectrice et sécurisante avec son entourage et notamment avec la personne qui le materne. L’attachement qui va se tisser alors répond directement à ce besoin. Il permet d’établir un investissement fort avec l’objet libidinal, objet d’amour et de désir. Mais, ce lien privilégié étant appelé à ne pas être permanent, « l’angoisse de séparation développementale constitue une donnée normale, obligatoire et attendue chez tout enfant » (p.27).

Au fur et à mesure qu’il devient capable de se représenter l’objet disparu, de discriminer ce qui l’entoure et de comparer avec un modèle intériorisé, l’enfant va tolérer de plus en plus l’éloignement des êtres qui lui sont chers. L’acquisition de nouvelles compétences, comme la parole par exemple, lui permet de renforcer sa capacité à supporter la séparation, en mettant en œuvre une médiation symbolique. Normalement, les manifestations d’anxiété ne durent pas dans le temps. Elles s’évacuent en trois étapes. Il y a d’abord la protestation face au vécu douloureux subi. Puis vient la phase du désespoir qui répond au travail de deuil. Enfin, survient le détachement qui correspond à l’adaptation à la nouvelle situation. La crise d’angoisse intervient dès lors qu’une détresse persiste, avec des paniques, des céphalées, des vertiges, des vomissements… autant de troubles persistants qui menacent le contenu mental de l’enfant.

De telles manifestations sont présentes chez environ 4 % des enfants et des adolescents. Bien des explications ont été émises pour essayer de comprendre les mécanismes de production ou d’activation de cette angoisse : transmission génétique de la propension à la peur, résurgence d’un style d’attachement anxieux acquis dans la toute petite enfance, troubles dépressifs chez les parents, accumulation d’événements traumatisants, manifestation clinique d’un dysfonctionnement du stress… Mais il n’existe pas de théorie unificatrice. Se pose la question de la ligne de partage entre le normal et le pathologique. Ce qui peut être vécu comme adapté à un âge donné, ne l’est plus à un autre. Tout comme un même comportement peut avoir une signification bien différente selon le contexte socio familial dans lequel l’enfant évolue. Quelle attitude doivent adopter les parents ? Choisir une stratégie de soins ou de prévention est chose délicate : entre la banalisation et la stigmatisation, la voie est étroite.

L’auteur décrit les pistes proposées par les thérapies psychanalytique, familiale, comportementale ou biologique. Ce que l’on peut dire, c’est que les conduites d’évitement tout autant que de surprotection constituent un facteur favorisant le trouble. Et que le renforcement de l’estime de soi de l’enfant, lui permettant de découvrir par lui-même ses ressources personnelles et ses limites, est plutôt aidant. Il convient dans tous les cas d’apprendre à l’enfant des stratégies d’adaptation.


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