N° 890 | Le 26 juin 2008 | Katia Rouff | Critiques de livres (accès libre)

Et pourtant je me suis levée tôt

Elsa Fayner


éd. du Panama, 2007 (172 p. ; 15 €) | Commander ce livre

Thème : Emploi

Durant la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy, jugeant inacceptable « que certains refusent de se lever tôt », entendait « réhabiliter le travail et au-delà, le mérite, l’effort et le goût du risque ». Suivant ses conseils, Elsa Fayner, journaliste à Paris, retrousse ses manches et met le cap sur Lille. Objectif : travailler et réaliser une contre-enquête : le salaire minimum est-il trop confortable ? Suffit-il de travailler plus, pour gagner plus ? Munie d’un CV revu à la baisse, la trentenaire se lance à l’assaut des magasins et des restaurants, épluche les petites annonces et prospecte dans les agences d’intérim. Surprises : « Caissière, c’est bac + 3 ou 4 et on reçoit jusqu’à 150 CV par jour », pour les emplois tertiaires, mieux vaut cumuler une formation et de l’expérience…

Elle décroche un premier poste de télévendeuse d’abonnements téléphoniques, un métier exercé par 200 000 personnes en France. Elle vend ensuite des hot-dogs dans la cafétéria d’une grande surface puis devient employée d’hôtel quatre étoiles (« Rester jusqu’à 22 heures vous pose problème ? »). Après trois mois « d’immersion dans le quotidien des travailleurs précaires », Elsa Fayner nous livre ses constats : rares ne sont pas les entreprises ayant exclusivement recours aux contrats courts, les horaires et les conditions de travail dans la restauration et l’hôtellerie s’avèrent particulièrement pénibles, les méthodes de management observées dans les grandes surfaces sont également en vogue dans d’autres enseignes… Vivant, parfois drôle, toujours étayé de chiffres et de paroles d’experts, son reportage dément les paroles présidentielles. Pour une femme de trente ans, sans qualification, même motivée et sérieuse, travailler plus, pour augmenter son pouvoir d’achat, n’est pas gagné.


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