N° 700 | Le 11 mars 2004 | Patrick Méheust | Critiques de livres (accès libre)

Santé mentale. Villes et violences

Sous la direction de Michel Joubert


éd. érès, 2003 (336 p. ; 25 €) | Commander ce livre

Thème : Maladie mentale

Que peut-on mettre sous l’expression santé mentale et comment peut-on agir sur les déterminants sociaux de la santé mentale ? C’est l’exercice auquel se livre cet ouvrage fort intéressant qui regroupe et prolonge les réflexions qui ont parcouru un séminaire animé par l’association Resscom (Recherches et évaluations sociologiques sur la santé et les actions communautaires) en partenariat avec la délégation interministérielle à la Ville et la direction générale de la santé. Le concept de santé mentale reste encore dominé par l’approche médicale, psychiatrique en particulier, qui présuppose que les personnes reconnues comme souffrant de pathologies dûment identifiées par leurs symptômes, se voient appliquer les traitements médicaux qui conviennent.

Pourtant, de toute évidence, la problématique dépasse aujourd’hui très largement cette vision par trop manichéenne. En particulier, la souffrance psychique des personnes en situation de précarité sociale est à distinguer absolument de la maladie mentale. Les actions à mettre en œuvre à ce niveau différeront donc complètement d’une stratégie thérapeutique orientée « psychiatrisation » même si certaines situations (précarité, chômage, évènements de vie douloureux et fortement déstabilisants, etc.) contribuent à potentialiser des fragilités psychologiques. Éviter une médicalisation à outrance, c’est aussi préserver la personne d’un processus qui semble assez souvent se manifester de manière quasi inexorable : l’immersion dans le rôle de patient.

Les études montrent en effet qu’une hospitalisation en psychiatrie malmène violemment le sentiment de compétence nécessaire à l’estime de soi et donc à une certaine forme de bien-être psychique. Dans la perspective d’une prise en charge évitant une trop forte stigmatisation, un partenariat entre instances médicales et sociales s’avère donc judicieux. Cette collaboration passe par une action directe auprès des publics sensibles afin de développer une véritable politique de prévention. Le repérage précoce des situations à risque, permettant un accompagnement très en amont, doit être privilégié grâce, entre autres, à la présence discrète de professionnels de la psychiatrie dans les lieux fréquentés par les populations connaissant de graves difficultés sociales. Mais il ne s’agit là, bien entendu, que d’une des nombreuses pistes explorées par le livre. À consulter par conséquent sans réserve aucune.


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