Les États généraux du travail social n’auront pas lieu

« C’est quand, les États généraux du travail social ? » Par cette question rythmant son discours lors de la présentation du rapport de la députée Brigitte Bourguignon le 2 septembre dernier, la secrétaire d’État Ségolène Neuville soulignait l’attente des travailleurs sociaux. Le gouvernement vient de donner sa réponse. À l’en croire, ils seraient terminés, à l’issue « de nombreux échanges dans les territoires au cours de l’année 2014 » et des synthèses des groupes de travail issues des travaux des assises régionales sur les cinq thèmes suivants : coordination des acteurs, formation initiale et formation continue, métiers et complémentarités, place des usagers, développement social et travail social collectif. Place désormais à la mise en œuvre, avec le Plan d’action interministériel en faveur du travail social et du développement social, présenté le 21 octobre.
Qu’y lit-on ? Les grands axes du travail social version début XXIème siècle, avec d’abord la promotion de la participation des personnes et la simplification de l’accès à l’accompagnement, grâce la mise en place d’un « premier accueil social inconditionnel de proximité » suivi d’un accompagnement par un référent de parcours ; la promotion du développement social au sein des départements, avec la fusion des schémas départementaux en un « pacte des solidarités et du développement social » ; la revalorisation du travail social, avec le reclassement en catégorie A des fonctionnaires de la filière sociale et « la modernisation de l’appareil de formation » : création d’un corpus commun de connaissances, renforcement de la qualité des formations initiales et continues, passerelles entre formations sociales et universitaires ; enfin la rénovation de la gouvernance du travail social, avec notamment la transformation du Conseil supérieur du travail social (CSTS) en Conseil interministériel du travail social (CITS).
Pour montrer l’importance accordée à la formation et donc aux jeunes pousses du travail social, c’est dans un IRTS que Ségolène Neuville a souhaité présenter jeudi 22 ce plan d’action. Le choix de Nancy pour communiquer ne doit rien au hasard, la Meurthe-et-Moselle étant l’un des départements vertueux en matière de développement social. Côté réactions, l’Unaforis a salué « un événement majeur » et « une base politiquement forte et courageuse », malgré certaines « ambiguïtés ». L’Uniopss de son côté « se félicite de l’implication politique du gouvernement sur cette thématique, qui se concrétise dans des mesures visant à favoriser la rénovation du travail social », mais regrette « qu’une conférence n’ait pas permis de matérialiser la fin des États généraux ».
Car reste, malgré l’affichage politique, un fort goût d’inachevé. Au départ ambitieux, ces états généraux censés laisser la parole au peuple des travailleurs sociaux ont rapidement tourné au fiasco. Bien peu ont pu s’exprimer et bien peu ont été entendus. Les besoins évoqués lors des assises territoriales – participation des personnes accompagnées, développement social ou décloisonnement – étaient en outre déjà largement connus. « C’est quand les États généraux du travail social ? » . Finalement, nous avons la réponse : ils n’ont pas eu et n’auront pas lieu. Repris en main par l’État, ils ont abouti à une orientation politique du travail social, avec ses insuffisances mais aussi ses perspectives intéressantes. Ceux qui restent sur leur faim peuvent toujours se tourner vers les mieux nommés États généraux alternatifs du travail social, organisés par le collectif Avenirs Educs et une demi-douzaine de syndicats.