N° 896 | Le 11 septembre 2008 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)

Le pédéraste et le pédophile à l’école

Thierry Petitot


éd. L’harmattan, 2007 (101 p. ; 11 €) | Commander ce livre

Thème : Abus sexuel

Foisonnant, ce petit livre d’un collègue éducateur, tourné vers la sociologie et les sciences de l’éducation. La tradition républicaine veut que la sexualité tant de l’enfant que de l’enseignant reste aux portes de l’école. Pourtant, les agressions pédophiles perpétrées à l’école, même si elles relèvent de l’épiphénomène, démontrent que certains professeurs ne peuvent refréner leurs pulsions et passent à l’acte, profitant de l’aubaine que leur procure leur position professionnelle. L’enfant, loin de vivre dans un monde d’insouciance et de sécurité, n’est donc pas au sein de l’institution scolaire complètement à l’abri de la folie de l’adulte. Pendant longtemps, cette réalité sera restée tabou.

En fait, la pédophilie existe en matière d’éducation, depuis la nuit des temps. L’antiquité grecque fit du pédéraste un enseignant incontournable dont seule l’élite profitait ! La vision de l’enfant a, depuis, totalement changé. Dans nos civilisations contemporaines, son corps est sacralisé et il est considéré digne d’une protection et de soins spéciaux. L’âge des relations sexuelles est codifié, menant en prison celles et ceux qui veulent l’ignorer. Pour autant, affirme l’auteur, il ne faudrait pas bannir l’affectif de l’école au risque de la déshumaniser complètement : « sans amour il est impossible d’enseigner » (p.45). Transmettre un savoir peut difficilement se faire en restant indifférent à celui ou à celle à qui on le transmet. Aimer ses élèves n’est pas en soi pervers. Cela peut tout autant structurer que détruire l’enfant.

Quelle différence peut-on alors établir entre celui qui prend le corps de l’enfant pour un objet de ses désirs et celui qui le considère comme le sujet des connaissances qu’il apporte ? Ce qui les sépare, c’est la distance nécessaire et vitale qui permet à l’enfant de grandir et de s’émanciper. Le pédophile est avant tout amoureux de lui-même. Il est resté fixé à un stade de son développement psychologique, social et sexuel. En s’énamourant de l’enfant, il croit se voir dans les yeux de sa victime qui joue avant tout le rôle d’un miroir rassurant. Le pédagogue, qu’il le veuille ou non, prend une place plus ou moins importante de substitut de figure parentale. A ce titre, il est investi par l’enfant dans une relation d’attachement et attiré lui-même par celui-ci. Mais, il est avant tout là, pour l’Autre. L’enthousiasme et la passion qui impliquent l’amour de celui à qui il enseigne, est là pour développer la spécificité de son élève et non le garder sous son emprise.


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