N° 1156 | Le 5 février 2015 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)

Le mythe de l’islamisation • Essai sur une obsession collective

Raphaël Liogier


éd. du Seuil, 2012, (219 p. – 16 €) | Commander ce livre

Thèmes : Religion, Racisme

« Eurabia  », un continent européen opulent et vieillissant envahi par des vagues successives de populations musulmanes pauvres et jeunes, venant supplanter la culture occidentale par leur propre mode de vie. L’image est saisissante. Utilisée par nombre de populistes, elle fait frémir. Et pourtant, elle est totalement fausse. Raphaël Liogier en fait justice, dans un ouvrage très documenté et bien argumenté.

Les musulmans seraient de plus en plus nombreux à l’échelle de l’Europe ? Ils ne dépassent pas les 5,2 %. Au rythme actuel de leur croissance, il faudrait six mille ans pour qu’il deviennent majoritaire en Grande-Bretagne. Ils bénéficieraient d’une démographie galopante ? Leur taux de natalité s’est effondré, n’arrivant pas aux 2 % nécessaires pour que les naissances dépassent les décès. Leur religion prend de plus en plus d’influence ? Ce n’est rien en comparaison de l’église évangélique qui, elle, est en pleine expansion. On voit de plus en plus de mosquées ? Il y en a quatre vingt dix en France, avec en plus mille deux cent soixante deux salles de prières… pour deux millions cent mille fidèles.

En comparaison les protestants en disposent de trois mille, pour un million cent mille pratiquants. L’islam n’est pas compatible avec la démocratie ? Elle est bien plus un facteur de stabilisation, de pacification et de régulation que de confrontation avec la république. Ce n’est pas elle qui attire les extrémistes, c’est le radicalisme. Ils sont sureprésentés dans les prisons ? Comme l’étaient les Ritals et les Polacks, avant eux, à l’image de toutes les vagues de migration qui cumulent pauvreté et chômage. L’Europe a d’abord été fasciné par la culture musulmane, avant de la mépriser, d’en avoir peur et de vivre, aujourd’hui, dans une véritable paranoïa à son égard, les musulmans étant devenus les boucs émissaires de sa crise d’identité.


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