N° 1155 | Le 22 janvier 2015 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)

La vie après la peine

Serge Portelli et Martine Chanel


éd. Grasset, 2014, (352 p.– 20 €) | Commander ce livre

Thèmes : Prison, Insertion

Cet ouvrage écrit à deux plumes, celle d’un juriste et celle d’une journaliste, se consacre à une question trop souvent ignorée. Alors que les situations de récidive saturent les médias, on ne parle quasiment jamais de la désistance. Le sortant de prison est devenu un suspect en puissance, enserré dans des institutions de contrôle et de soins contraints. Mais jamais il n’est regardé dans sa capacité, pourtant bien réelle, à reprendre le cours de sa vie sans jamais reparaître devant une cour de justice. Car si le taux de récidive est en moyenne de 10 %, cela signifie que 90 % des détenus ne commettent plus les mêmes actes pour lesquels ils ont été condamnés. Parmi les infractions produisant le plus de rechutes, les conduites en état d’ivresse ainsi que les vols et recels. Parmi les moins propices, on trouve les délits sexuels : 5 % !

Bien des facteurs peuvent expliquer cette désistance : l’âge, la maturité, la lassitude, le temps qui passe, l’amour, le mariage, la paternité, le travail, la confiance accordée par les autres, les mains tendues, les nouvelles relations. D’autres éléments sont au contraire bien plus à risque : les addictions, les troubles de la personnalité, la pauvreté, la loyauté à un groupe délinquant. Tout cela est connu. Notre justice est au carrefour de deux chemins. Celui emprunté par les États-Unis, tout d’abord qui, avec ses 41.000 détenus sous perpétuité réelle, se sont transformés en État carcéral. Celui de la Suède, ensuite, qui avec ses trente cas suivis par conseiller de probation (entre 80 et 130 en France) a fait le choix de l’accompagnement de la réinsertion des condamnés. L’ouvrage alterne des chapitres de contrepoints juridiques et d’autres consacrés à des portraits de détenus ayant retrouvé leur place dans la société. On mesure les possibilités existantes de se réinsérer, et le gâchis quand les sortants de prison ne sont pas aidés à y parvenir.


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