La prévention de la radicalisation fait débat

La lutte contre la radicalisation, au cœur de l’actualité depuis plusieurs années, demeurera certainement un axe majeur de la politique gouvernementale. Elle est toutefois loin de faire l’unanimité, tant sur la conception de la radicalisation que sur les prises en charge et les méthodes employées.

Dans un « Avis sur la prévention de la radicalisation » paru fin mai, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) estime que les différentes mesures adoptées dans le plan d’action contre la radicalisation du 9 mai 2016 soulèvent des questions éthiques de respect des droits et libertés fondamentales. Elle y critique vertement la politique du gouvernement en la matière, plus précisément la méthode de « détection », basée sur la prédiction du comportement de personnes susceptibles de basculer vers une idéologie. Si prévenir les actes terroristes est une nécessité, restreindre une partie des droits de l’ensemble de la population n’est pas possible, selon la CNCDH. L’enjeu : la cohésion sociale et le principe même de l’État de droit.

Contestation du CIPDR

La commission conteste le concept de radicalisation adopté par le Comité Interministériel de Prévention de la Délinquance et de la Radicalisation (CIPDR) comme étant « un processus progressif, l’adhésion à une idéologie extrémiste, l’adoption de la violence ». Elle voit également d’un très mauvais œil le débordement du renseignement et du contrôle dans l’action sociale. « L’injonction au signalement » touche les travailleurs sociaux et en première ligne les acteurs de la prévention spécialisée et met à mal le cœur de leur mission qui repose sur le lien de confiance. La CNCDH demande aux pouvoirs publics de garantir l’autonomie des acteurs sociaux et le renforcement de ceux-ci dans leurs fonctions d’assistance et d’accompagnement.

« L’affaire de tous »

Elle s’inquiète également de la confusion entre renseignement et protection de l’enfance. Elle demande par exemple que le numéro vert d’écoute et d’accompagnement soit rattaché au 119 (N° enfance en danger).

La secrétaire générale du CIPDR, Muriel Domenach, estime pour sa part que « c’est la prise en charge pluridisciplinaire (sociale/psy/éducative) qui fonctionne le mieux » (1), que le « contre-discours est l’affaire de tous » et défend le travail des professionnels de l’action sociale dans cette problématique.

(1) dans une tribune publiée dans Le Monde le 15 mars 2017

L’avis de la CNCDH